The descent [ yaya ]

{ the descent }

Il n’est pas encore réveillé, je le sais, mais bientôt il le sera. Je me fraie un chemin discrètement jusqu’à la porte de sa chambre. Les doigts pressés contre la poignée de cette porte que je me dois d’abaisser dans la plus grande discrétion pour ne pas trahir l’effet de surprise que je m’apprête à abattre sur ses frêles épaules. Elle cède, glisse avec une aisance déconcertante, sans aucun grincement ni signe compromettant. Il est presque dommage qu’aucun obstacle ne soit là, à se hisser pour me rendre la tâche impossible. Un pas devant l’autre, j’ai aux lèvres l’un de ces sourires qui veut tout dire. Je marque un temps d'arrêt, forcé face à la montagne de vêtements, d'emballages et de baskets qui trainent un peu partout, jonchent le sol et menacent de s'écrouler à la moindre petite vibration. Le voilà, le challenge que j'adore. Mon plan est diabolique, il risque de m’en vouloir pendant un moment même si, au fond de lui, il ne pourra qu’être reconnaissant pour l’aventure que je m’apprête à lui imposer de vivre. Bruit de canette qui roule au sol. Yaël et ses tendances à emporter des bières avec lui avant de filer au lit. J’aurais dû m’en douter. Figé comme une statue, dans une position très inconfortable et hilarante, je le fixe intensément, à la recherche de la moindre émotion, du petit mouvement qui ferait complètement foirer cette quête ô combien extraordinaire. Je crois percevoir un sourcil qui se redresse, des ridules se retrousser et puis… Non, plus rien. Je peux reprendre mon périple, long, lent et délicieux jusqu’au bord de ce lit sur lequel je bondis, tel le fauve que je suis. « ON SE RÉVEILLE, IL EST L’HEURE D’ALLER EXPLORER DE NOUVELLES CONTRÉES ! » Avachi sur lui, je sautille comme je le peux pour qu’il soit plus secoué encore qu’une paire de chaussures dans une machine à laver. Le pauvre, je le haïrais profondément s’il était à l’origine d’un tel réveil et pourtant… Pourtant je suis heureux comme jamais. Pas parce que j’ai mis fin à sa nuit de la plus sadique des manières, plutôt parce que la journée s’annonce riche en émotions, en dépassement de soi. « Rendez-vous dans dix minutes en bas, je t’attends ! » J’abandonne cet immense lit à regret pour rebrousser chemin, attraper une balle en mousse et la lui envoyer au visage pour lui rappeler que, non, il ne pourra pas se rendormir. « N’oublie pas que je reviendrais à la charge si tu n’es pas prêt pour ma surprise ! » Il le sait, je suis très imaginatif lorsqu’on me pousse à redoubler d’effort. En attendant qu’il se décide à rejoindre la cuisine, j’achève de charger la voiture. L’excursion en plein milieu de cette grotte récemment découverte s’annonce palpitante et physique. Le pauvre va en baver, mais il a le goût de l’effort lui aussi, qu’il affirme le contraire ou non.

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âge : 26 ans || 02.02.1996

[ the descent ]

w/ @heath romeo

Les rayons du soleil peinaient à percer les stores de la fenêtre du juif, le laissant profiter de cette douce pénombre pour dormir encore un peu plus longtemps. Après une nuit plutôt courte, alors qu’il avait encore participer au close du Spotted Cat, il n’avait qu’une chose en tête profiter d’une grasse matinée pour ce jour de congé. Si seulement il avait pu… Dissimulé sous ses couvertures, la musique d’un violon s’échappant de ses écouteurs encore branché à son ordi qui trônait à côté de son oreiller, alors qu’il n’avait pas trouvé la force de l’éteindre en se couchant. Il dormait à point fermé, ne se doutant aucunement de ce qui se tramait, alors que la porte de sa chambre s’ouvrait, qu’on remontait le courant vers son lit, affrontant ce dédale qu’était sa chambre. La sensation d’un poids lourd sur son corps le réveillait en sursaut, alors que la voix portante – et beaucoup trop forte pour une personne encore endormie comme Yaël – d’Heath résonnait dans ses tympans, le bouclé poussait une injure en se débattant pour sortir de cette prise qui le clouait au lit. « FUCK VA TE… » Le temps qu’il avait pris à réagir, à sortir ces mots pour le moins impoli, il recevait quelque chose par la tête, sans doute une paire de bas roulé abandonné dans le cafouillis qu’était sa chambre – ou pas –, lui faisait perdre ses mots, laissant le brun quitter sa chambre telle la tornade emportant son sommeil avec lui. Assis dans son lit, il se passait les mains sur le visage, tournant la tête pour porter son regard sur cette table de chevet improvisé en livre où son portable se trouvait. Il l’allumait pour y voir l’heure. Trop tôt. « TU FAIS CHIER HEATH ! » gueulait-il alors que son meilleur ami avait quitté sa chambre et qu’il risquait de réveiller toute la maisonnée. Repoussant ses draps, il se levait tout de même sachant que le pompier reviendrait à la charge s’il ne se bougeait pas, pouvant très bien le sortir du lit par les pieds ! Ses boucles retombant devant ses jades encore embrumés par le sommeil, il allait choisir quelques habits, essayant de prendre quelque chose de passe-partout alors qu’il n’avait pas la moindre idée de ce que lui réservait Heath. Direction la douche, l’eau chassait son air endormi, mais bien loin de réveiller son cerveau, c’est une fois vêtu qu’il descendait vers la cuisine, en s’allumant sa première clope de la journée et sans doute pas la dernière. Bâtonnait coincé entre les lèvres, il entrait dans la cuisine, passant une main dans ses bouclettes humides, avant d’aller ouvrir le frigo. Dans tout ce qui se trouvait à l’intérieur, il piochait dans les aliments où son prénom se trouvait. Même s’il connaissait ses potes depuis des années, qu’il avait aucun mal à partager, il continuait d’indiquer son prénom sur les aliments casher. S’il n’avait aucun mal à manger autre chose en temps de sorti ou pour simplement faire plaisir si quelqu’un cuisinait et qu’il était présent, le reste de temps, il se conformait à ses croyances. Fromage et bagel pour le petit dej, il attendait que le pain ressorte du grille-pain pour manger et que le café – ultime chose qui pouvait le rendre plus agréable le matin – soit prêt. Clope entre ses lèvres, il regardait son portable, oubliant presque qu’Heath lui réservait une surprise, ignorant les détails, mais préférant ne pas y penser pour dire vrai.

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@yaël weisel

La sensation est exquise, elle est même profondément jouissive. Je l’observe, l’œil pétillant, animé par cette flamme que fait naitre en moi le machiavélisme évident de l’opération que je suis en train de mener. Il a l’air si paisible, endormi de la sorte. Il l’est sans aucun doute, plongé au milieu d’un rêve dont j’ignore tout, si ce n’est son intensité qui, à en juger par ses traits, semble ô combien grisante. L’Homme ne se souvient pas de ses rêves la plupart du temps. Quelle tristesse, une tragédie de se dire que Yaël s’apprête à être arraché au réconfort que lui apporte le sujet de ce dernier et qu’il ne se souviendra même pas s’être senti bien à cause de cela. Il te détestera peut-être un peu moins grâce à cela, vois le bon côté des choses. Il me vouera une haine très puissante dans tous les cas pour le réveil que je m’apprête à lui offrir. Elle s’estompera au bout de quelques minutes, plus ou moins, parce qu’il ne peut jamais me détester plus longtemps. Canette de bière, chaussette sale sur laquelle je trébuche, caleçon digne des plus vieux monuments naturels, érigé là, à même le sol, depuis des siècles et des siècles… Maniaque comme je le suis, je me demande encore comment je fais pour respecter son intimité en ne m’immisçant pas dans le plus grand des secrets ici, au centre de cette chambre qui, soyons honnêtes, ressemble plutôt à un bordel actuellement, pour effectuer un ménage digne de ce nom. Tu as toujours tendance à te faire peur quand tu mets les pieds ici, en imaginant marcher sur un cafard, une bestiole qui te ferais faire une crise cardiaque en un rien de temps. Ce parcours du combattant terminé, il ne me reste plus qu’à bondir sur cet ami qui m’aime autant qu’il m’exècre pour constamment venir le bousculer et l’emmener sur des plans qu’il juge foireux. Certains l’ont été, mais nos souvenirs en ont gagné en richesse. C’est à chaque fois ainsi, ce sont des galères que surgissent les meilleurs moments. Le réveil est bancal, il a les yeux ouverts mais son esprit est encore ailleurs… Il ouvre la bouche, commence à prononcer quelques mots et je rebondis fièrement, pas le moins du monde inquiété par la vulgarité avec laquelle je m’apprête à lui renvoyer la balle. Avec l’aplomb que tout le monde me connait. « Me faire enculer ? Je sais que tu rêves à ce moment, mais je t’ai déjà dit qu’il me faudrait beaucoup d’alcool pour accepter une telle chose… Ou peut-être une tente en montagne… » C’est bien ainsi que Heath Ledger est parvenu à pécho Jack Gyllenhaal après tout.

Quelques pas en arrière, un lancé de chaussette plutôt bien senti et une nouvelle série de mouvements censée me permettre de quitter la pièce sous ses indignations qui font s’étirer mes lèvres en un sourire plus important encore. « MOI AUSSI JE T’AIME, GRAND FOU ! » J’embrasse la paume de l’une de mes mains pour lui envoyer un baiser à l’ironie ahurissante et pourtant immensément significative quand on sait comment nous fonctionnons tous les deux. De l’amour vache, comme nous le rabâche constamment Holly. Les minutes passent, trépassent et à l’étage inférieur, en plein milieu de la cuisine, je profite du temps qu’il me reste pour me concocter cette omelette qui, je le sais, m’apportera les protéines nécessaires à l’effort physique envisagé pour les heures à venir. J’ai tellement hâte de le voir galérer avec ses petits bras de gringalet. La scène promet d’être amusante, j’ai déjà prévu le matériel nécessaire – une belle GoPro – pour pouvoir tout immortaliser de ses cascades. Il descend, se fait couler un café et je l’observe, en pleine forme… Tout le contraire de lui, à en juger par les cernes qui trônent fièrement sous ses yeux et par cet air hagard qui semble attester de la brume qui entoure probablement encore son esprit à l’heure actuelle. « T’es rentré tard dans la nuit ? » Simple curiosité, je sais qu’il a plutôt tendance à ne pas discuter dès le réveil, tout comme moi d’ailleurs, attaquer progressivement semble être le meilleur moyen de ne pas le brusquer. Ce serait dommage qu’il soit de mauvais poil toute la journée.

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âge : 26 ans || 02.02.1996

[ the descent ]

w/ @heath romeo

Trop dans la brume pour répondre quelque chose de sanglant à son meilleur ami, Yaël passait une main dans ses bouclettes. Réveillé ainsi, il aurait dit à n’importe qui d’aller se faire foutre. Inutile d’entendre la suite de ses propos pour comprendre où il voulait en venir. Si ç’aurait pu le provoquer, lui donner de quelconques idées pour un énième plan foireux, Yaël ne possédait aucune répartie à ce moment. Seul une grimace s’affiche sur son visage sommeillant, il trouvait tout de même la force de lever une main pour offrir un digne doigt d’honneur au brun qui lui faisait un baiser volatile. Connaissant Yaël, on aurait pu croire que son coloc l’exécrait réellement, n’aimant que peu de gens, mais non. Il avait simplement une manière différente de démontrer son affection. Loin d’être la personne débordante d’affection, il était difficile de croire qu’il arrivait à faire quelque chose dans ses scénarios tellement différent de ce qu’il était. Une maison encore endormie et lui qui se retrouvait réveillé bien plus tôt que ce qu’il aurait souhaité. Bye-bye grasse matinée. C’est pratiquement traînant les pieds qu'il vaquait à ses occupations matinale. Il arrivait dans la cuisine, une odeur d’omelette flottant dans l’air. C’est sans regarder le pompier qu’il se préparait à manger, prenant son rythme, ne cherchant pas à communiquer, tenir une conversation. Loin d’être très communicatif à peine debout, il ne fallait jamais trop le bousculer si on ne voulait pas prendre la chance qu’il présente les crocs. Comme beaucoup, Yaël possédait sa propre routine. Sans café ni clope, il était tout simplement impossible de voir le juif afficher ne serait-ce qu’un sourire. Son regard plongé sur l’écran de son portable, il lisait un article sur la dernière pièce de Broadway de son père. Encore des éloges et lui qui restait dans l’ombre, à peine remarqué dans cette mer. Il relevait ses jades pour regarder son meilleur ami, quelques bouclettes retombant devants ses yeux. Fermant l’écran de son téléphone, il le posait sur le comptoir derrière lui, tapotant par la même occasion son bâtonnet dans le cendrier qui traînait. « Je faisais le close, il devait être trois et demi du mat. » répondait-il, et autant dire qu’il n’avait pratiquement pas dormi. Malheureusement, il en avait l’habitude lorsque son horaire entre le Spotted Cat et le Subway se chevauchait d’une journée. Il finissait toujours tard dans un et commençait toujours dans l’autre. Par chance, il était jeune, ça ne l’affectait pas vraiment, même si le besoin de caféine et de nicotine le soulageait. Il portait sa clope à ses lèvres, regardant d’un bref coup d’œil où en était son café. Le percolateur laissait la dernière goutte tomber et il se servait une tasse sans sucre, sans lait, corsé et noir. Il prenait son assiette contenant son bagel, il la posait sur son avant-bras, cendrier dans une main et tasse de café dans l’autre, il avait tout du petit serveur – mais c’est ce qu’il était. Il posait le tout sur la table en face de son pote. « Et pourquoi j’ai eu droit à un réveil aussi matinal ? » demandait-il en plissant les paupières d’un air accusateur. Il méritait bien de savoir, après tout qu’est-ce qui l’empêchait de retourner se coucher ?

Spoiler:

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