Les dernières semaines avaient été éprouvantes. Tout d’abord l’hospitalisation de son père avait secoué la famille jusque dans ses fondements. Ou plutôt était-ce Asani qui avait été terriblement secouée. Bakari avait géré la situation avec brio, en tant qu’aîné, il était parvenu à gérer toute la paperasse, l’entreprise paternelle et Asani avait réalisé qu’il était prêt. Il était prêt à remplacer le patriarche, il saurait faire avec son absence, elle, non. Elle n’avait pas encore considéré l’existence sans le héros. Il s’en était remis la première fois, elle était persuadée qu’il en serait de même cette fois également. L’heure n’était pas encore arrivée, elle s’y refusait catégoriquement. Puis, il y avait Hakeem qu’elle évitait soigneusement depuis qu’elle l’avait surpris avec un homme. Jadis proches, leur rapport consistait aujourd’hui au jeu du chat et de la souris, cache-cache serait sans doute plus adapté. Asani fuyait cette conversation autant qu’elle regrettait de s’être montrée ce soir-là sans s’annoncer au préalable. Elle ne l’avait jamais, peut-être faudrait-il qu’elle commence à respecter l’espace privé des autres, sa famille y compris. Elle poussa un long soupir et s’empressa de mettre de la musique, les rythmes latins lui mettaient toujours un grand sourire sur les lèvres. Elle retourna derrière les fourneaux afin de vérifier que tout mijotait parfaitement, Nina ne devrait plus tard. Asani sortit également les bouteilles de ses placards qu’elle posa sur la table, puis entreprit de réaliser un cocktail dont elle avait le secret et qu’elle savait très aimé de son amie. Empanadas maison, alcool, des pizzas, de la musique et de la bonne compagnie, que pouvait-elle souhaiter de plus ? Des nouvelles de sa fille, peut-être. Un appel d’Isaiah lui permit de marquer des points dans sa course pour être la mère de l’année. Le schéma familial n’avait rien de classique, Asani refusait d’abandonner sa liberté en devenant parent, elle était persuadée qu’elle pouvait concilier les deux. Et elle semblait y être parvenue, Imani semblait être une enfant équilibrée qui recevait l’amour de ses deux parents, n’était-ce pas là le plus important ? ils n’avaient nul besoin d’être un couple ou de vivre ensemble pour cela. Asani raccrocha finalement et sortant son plat du four, la sonnerie retentit. Miss Vikander faisait sa grande entrée. Elle déverrouilla la porte du bas puis laissa celle de l’appartement entrebâillée et attendant que son amie la rejoigne, elle partit disposer le nécessaire apéritif dans des assiettes. Revenant au salon, elle y découvrit sa meilleure amie et il ne lui fallut que quelques secondes pour se retrouver dans les bras de cette dernière. « Bébé, te voilà enfin ! » la présence de Nina suffisait à tranquilliser son esprit, elle avait toujours eu cet effet étrange sur elle. « Comment tu vas ? »
Ta vie, ces temps-ci, à tendance a stagner. A la caserne, tout ce passe pour le mieux, mais un petit sapeur pompier qui veut devenir lieutenant à son tour à tendance à se rebeller contre tes directives. Avec ta fille, c'est toujours le même bordel; le peu que tu l'as avec toi, elle n'obeit jamais, et demande toujours son père. Avec Carter, certaines règles ont reussit à être établies; mais vous avez encore tendance à vous prendre pas mal la tête. Divorce catastrophique, et depuis deux ans, vous avez encore du mal à vous entendre. Ton père te bassine avec sa campagne, t'essayes de les éviter. Et malheuresement, tu as toujours du mal à lever le coude avec la boisson; fort heureusement, tu caches bien ton jeu. Malgré qu'Asani soit ta meilleure amie, tu ne te vois pas lui en parler. D'abord parce que ta copine n'as pas eu une vie facile; et que ce n'est pas ton genre de te plaindre. Tu as également bien trop de fierté pour admettre que tu es dépendante de l'alcool.
Tu gares ta vieille Cadillac sur le parking à proximité de l'appartement d'Asani. Comme d'habitude; tu ne sors jamais sans ton perfecto noir favoris. Clope au bec, tu t'avances vers l'interphone. La belle brune débloque la porte d'entrée de la résidence et tu écrases à l'aide de ta bottine ton filtre sur le bitume.
Tout doucement, tu pousses la porte d'entrée déjà entre-ouverte. Tu prends tes aises avec ton amie; et tu te rends directement dans le salon. L'odeur qui émane dans l'appartement est alléchante, tu sais qu'Asani à préparer de bons petits plats, comme à son habitude. Tu aimes tellement te rendre chez elle, parce que tu es toujours reçue comme une vraie reine. Tu l’aperçois enfin, prête à t’accueillir dans ces bras « - Haa ma beauté ! Désolée du retard... Moi qui est ponctuelle, tu me vois véritablement confuse ! » Tu poses ta main sur l'épaule de ta meilleure amie. « - Doucement mais surement ! Boulot dodo comme on dis. » Tu t'installes sur le canapé, mettant tes sur les genoux, admirant ce succulent cocktail qu'Asani à toujours l'habitude de te faire. Tu ne veux point savoir la recette; c'est son petit secret, et c'est la la beauté de cette boisson : que ce soit sa meilleure amie qui le prépare. « - Je suis toujours reçu comme une reine chez toi ! » Tu remontes les manches de ton petit pull gris, et tu te mordilles doucement les lèvres. « - Et toi alors ? la forme ? » Doucement, ton regard se dirige vers quelques objets par-ci par-là. Cette bonne vieille amie à toujours aimée apporter de la nouveauté chez elle. Tu rigoles doucement. « - Je vois que tu as encore achetée des coussins et ce vase ? Ca n'y était pas avant ? T'as vraiment du gout, j'adore. Tu as toujours sû harmoniser c'est dingue. » L'odeur du four s'engouffre à nouveau dans tes narines. Asani à toujours été douée derrière les fourneaux, pour ton plus grand bonheur à chaque fois que tu viens lui rendre visite. « - Tu as encore fait des folies en cuisine ? » Dis-tu en riant légèrement.
S’il y avait bien quelque chose qu’Asani redoutait, c’était le silence et le vide de son appartement, si bien que lorsqu’elle devait s’y retrouver seule, la musique était omniprésente. Fait qui avait d’abord agacé ses voisins, mais ils n’avaient eu d’autre choix que de s’y faire. Tout comme ils avaient dû se faire aux allers et venues incessants de la part de sa famille, le plus souvent. Les Wayans n’étaient pas réputé pour leur silence, bien au contraire, surtout le dernier de la fratrie qui appréciait que les autres sachent qu’il honorait cet immeuble de sa présence majestueuse. Les plaintes avaient été nombreuses, mais son sourire savait tourner la situation en sa faveur, comme toujours. Ce soir encore elle n’était pas certaine que le voisinage soit ravi, tant pis, elle se ferait pardonner avec ce qu’ils resteraient du repas de ce soir. La nourriture s’était avéré une solide monnaie d’échange, qu’à cela ne tienne, elle aimait à passer son temps derrière les fourneaux. « Dans mon immense bonté, je te décide de te pardonner » contra-t-elle avec un ton solennel auquel s’accompagnaient des gestes grandiloquents « je comprends que le statut de lieutenant implique des responsabilités, bientôt il va me falloir contacter ton secrétaire » elle afficha un sourire amusé alors que le séjour s’offrait aux habitudes bien ancrées de Nina, elle était ici chez elle et Asani tenait à ce qu’elle agisse comme tel. Elle offrit d’ailleurs une révérence lorsque sa meilleure amie mentionna le traitement royal dont elle jouissait, accompagné d’un léger sa majesté puis d’un bref éclat de rire. « Ça va plutôt bien » ou plutôt ça allait mieux, la santé du patriarche semblait s’améliorer, de quoi taire ses angoisses. « Tu as l’œil ! C’est pas moi qui ai choisi cette fois, Pablo est revenu du Chili il y a pas longtemps et ce sont ses cadeaux » Pablo était cet homme marié, soixante-dix ans bien entamée qui lui faisait ouvertement du rentre dedans depuis des années sans réelle volonté d’aller plus loin, il aimait à lui rappeler que s’il était célibataire avec vingt années de plus, ils formeraient le couple le plus glamour de la Nouvelle-Orléans. Aussi, il la traitait avec les égards de cette éventualité, elle, s’en amusait, loin de le prendre au sérieux bien que les limites étaient érigées. « Il a dit que quand il les a vus, ça lui a fait penser à moi alors il les a achetés et faut avouer qu’il s’est pas trompé, ça se fond bien dans le décor » D’autant plus qu’il n’était jamais venu chez elle, à sa connaissance du moins. « Pour ce soir, le menu c’est empanadas maison qui refroidissent en attendant d’être dévorés et j’avais pensé qu’on commanderait aussi des pizzas et comme tu le vois, ton verre n’attend que toi » Elle récupéra ainsi le sien et attendit que Nina en fasse de même avant de trinquer « A nous » l’on pouvait faire mieux mais elle savait que son amie ne s’en formaliserait que très peu. « Tu remarqueras sûrement une petite différence sur la fin » La recette originelle fonctionnait très bien mais sous les conseils de Pablo, elle avait ajouté un peu d’épices pour que l’arrière-goût soit un peu plus prononcé et elle devait reconnaître qu’il connaissait son métier, on ne gérait pas le meilleur bar latin en ville par accident. « Alors, t’en penses quoi ? » C’était l’une des boissons qui réalisaient le plus pour Nina, aussi son avis était important. Elle, en tout cas, était pleinement conquise par cette addition. « Au fait t’auras des vacances cet été ? J’ai bien envie de faire une escapade » Il était déconseillé pour son père de bouger durant les prochains mois, aussi la Jamaïque en famille était à oublier.
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