[terminé] Rules are meant to be broken (Siobhan & Austyn)

âge : trente-cinq ans - 20.08.1987.

[ Rules are meant to be broken ]

@Siobhan Caldwell & @Austyn Walters
Le plus silencieusement possible, tu fermes la porte d’entrée de la maison. Gardant la poignée entre tes doigts, tu lâches un léger soupir, fière d’avoir franchi cette première étape. Avoir la sensation de marcher sur des oeufs dans sa propre maison n’est vraiment pas une sensation agréable, mais l’avantage est que tu connais les lieux par coeur. Chaque latte de plancher qui grince, chaque porte qui est un peu plus bruyante que d’ordinaire. Tu connais tout ici et au fil des années tu as donc appris à avoir les gestes parfaits pour ne pas être repérée. Dans certains contextes, tu pourrais justement essayer de faire le plus de bruit possible, afin de traduire ton mécontentement ou ta colère. Aujourd’hui cependant, tu sais que le moindre bruit attirera sur toi les foudres maternelles que tu cherches justement à éviter. Il est tôt, bien trop pour que tu sois réveillée normalement, mais il faut dire que tu n’as pas fermé l’oeil de la nuit. Occupée à courir dans les rues de la Nouvelle Orléans, tu as passé les heures les plus obscures avec tes amis, à faire les fous et trouver des choses toujours plus stupides à faire. C’est donc fatiguée, mais avec un sourire sur les lèvres que tu rentres chez toi, prête à te mettre au lit, peu avant sept heures du matin. Au lit, oui, mais avant il faut que tu fasses quelque chose pour ton estomac qui crie famine. Lentement, tu poses tes chaussures au pied de l’escalier, avant de te diriger vers la cuisine. Un petit déjeuner express s’annonce, avant que tu ne réponde à l’appel de ton lit. Avec des gestes que tu pourrais faire les yeux fermés, tu prends de quoi te faire un chocolat chaud. Une fois que ta tasse tourne dans le micro-onde, tu te verses un bol de céréales, commençant à engloutir sans attendre. Doucement, tu commences à fredonner une chanson, dansant légèrement sur place jusqu’à ce que le bip familier du micro-onde te fasse réagir au quart de tour. Tu l’arrêtes, puis une fois ta tasse en main, tu te retournes pour aller t’asseoir. Mais en plein mouvement, un sursaut s’empare de ton corps et un léger cri passe tes lèvres. Ta mère se tient de l’autre côté de la cuisine, les yeux braqués sur toi et bien que tu ne devrais pas être surprise, tu ne t’y attendais absolument pas. « Oh putain ! Maman, tu m’as fait peur ! » Le mot est sorti seul, sans que tu le contrôles et sans même que tu ne t’en rendes vraiment compte. A dix-sept ans, il est normal que des injures passent tes lèvres, mais d’habitude tu essaies de ne pas trop le faire devant ta mère. Tu sais qu’elle n’aime pas ça, ça ne colle pas avec l’image de petite fille parfaite qu’elle veut que tu sois. Te remettant de tes frayeurs, tu prends une nouvelle gorgée de chocolat chaud, te disant intérieurement qu’il va falloir que tu changes de plan. « Tu es levée tôt dis donc… » Un sourire innocent, intéressé. Ca aussi c’est une technique tu as développé au fil du temps : poser des questions pour qu’on ne t’en pose pas.

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@austyn walters

L’heure tournait et au bout d’un moment, elle avait tout simplement proposé à Sasha d’aller se coucher sans elle. Sans nul doute qu’elle aurait pu y aller avec lui, mais son portable dans sa main, ses bras croisés, alors qu’il écartait le rideau à intervalle régulier pour jeter un coup d’œil dehors. Cette situation avait de quoi tirailler son esprit, sa seule et unique fille n’était toujours pas rentrée et minuit approchait. Il y avait de quoi se faire un sang d’encre. Que pouvait-il être arrivé ? La rousse avait composé son numéro plus d’une fois, elle avait appelé Maya et même Rachel pour savoir si elles n’avaient pas vu sa fille, mais rien. Un baiser sur sa joue, elle tentait un sourire à son compagnon, jurant qu’elle préférait rester éveillée. Elle hésitait même à appeler les flics, mais elle savait que c’était trop tôt pour cela. Tout ce qu’elle avait à faire, c’était ne pas penser à toutes les catastrophes qui pourraient arriver, alors qu’elle restait sans nouvelles. En fait, il lui était impossible de ne pas y penser, chaque éventualité ne pouvait que la faire pâlir davantage. Il ne lui restait plus qu’à prier pour que le déchirement de cette famille ne même pas à quelque chose de bien plus dramatique. Elle quittait la fenêtre au bout d’un certain temps, un châle posé sur ses épaules, elle allait prendre place dans le canapé du salon, sortant d’un tiroir un harmonica. Souvenir de son père, elle le laissait tourner entre ses doigts, pensant à sa fille devenue hostile depuis ce mariage. La quarantaine avancé, Shiv venait à se demander si elle avait fait les bons choix. Peut-être était-ce trop tôt dans leur relation, aurait-elle dû attendre ? N’avait-elle justement pas attendu assez ? Elle avait priorisé ses enfants, toujours. Ils étaient désormais grands, ils prendraient tous les deux leur envol, devait-elle rester seule ? Essayant d’oublier toutes ces questions, elle laissait l’horloge avancé. Attendre, qu’est-ce que ça pouvait être terrible… Le soleil s’était levé, illuminant doucement la maison, alors que la rousse n’avait toujours pas quitté son canapé, toutefois, elle s’était assoupie. Le bruit de la porte s’immisçait dans ses rêves. Rêver du retour de sa fille c’était tout ce qu’elle arrivait à faire. Elle restait dans le confort de son châle que quelques minutes encore avant de se réveiller en sursaut pour finalement poser son regard sur la porte d’entrée qu’elle pouvait apercevoir d’où elle se trouvait. Son regard se posait sur une paire de chaussure poser naguère près de l’escalier. Se levant en trompe, elle allait monter à l’étage pour voir si elle dormait, mais cacophonie qui provenait de la cuisine, dans cette maisonnée encore endormie, elle prenait la direction de la cuisine. Sous ses orbes clairs, elle voyait Austyn s’afférer à se faire à manger. Croisant ses bras contre sa poitrine, Siobhan sentait une explosion de sentiment l’envahir. Crainte. Soulagement. Colère. Attendrissement. Cette escapade nocturne n’avait rien d’une merveille pour cette mère folle d’inquiétude. Trouverait-elle la force d’innocenter les agissements de sa fille ? Sans doute pas, avait-elle conscience de la frousse qu’elle avait causé à sa mère ! « Ton langage. » disait-elle d’un ton tranchant bien loin d’arriver à cacher à quel point elle n’était pas contente. Sans broncher, gardant son regard rivé sur Austyn, Shiv l’observait. Elle avait beau chérir cet enfant, elle ne l’avait pas éduquée ainsi. « Oh, ce n’est pas si tôt que ça. Tu le sais. » En effet, Siobhan pouvait se réveiller en général avec le lever du soleil, un horaire souvent beaucoup trop chargé pour s’accorder de longue matinée. Ayant pris l’habitude de se préparer avant le lever de ses enfants, de leur préparer leur petit déjeuner ainsi que leur lunch avant même qu’ils ne sortent du lit. Ce n’était plus vraiment le cas, mais elle avait un mal fou à changer ses habitudes de plus de vingt ans. « Mais toi c’est autre chose. Où étais-tu cette nuit ? » entrait-elle dans le vif du sujet.

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âge : trente-cinq ans - 20.08.1987.

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@Siobhan Caldwell & @Austyn Walters
Tu es sur un nuage Austyn, cette sensation bien connue d’être fatiguée mais de n’avoir aucune envie d’aller se coucher. Après avoir passé la nuit dehors, c’est évidemment ce que tu ressens, une explosion d’adrénaline, croyance d’être absolument invincible et de pouvoir faire ce que tu souhaites. Tu ne sais bien que ce n’est pas exactement le cas, si ta mère apprenait que tu n’avait pas fermé l’oeil de la nuit et que tu avais préféré déambuler dans les rues de la ville pour une promenade nocturne sous la lumière lunaire, elle aurait une réaction des plus extrême. Jamais elle n’oserait te gifler, tu connais la femme qui t’a donné la vie et elle est bien trop douce pour cela. Mais t’interdir de sortir, te confisquer ton téléphone ou te forcer à faire des corvées, ça elle en serait totalement capable. Lorsque tu pénètres dans ton quartier, tu t’appliques déjà à te faire un peu plus petite, un peu plus discrète. Le soleil se lève déjà, un voisin pourrait très bien te voir et rapporter à ta maternelle que tu rentrais en catimini à des heures indécentes. Heureusement, la fatigue ne joue pas sur le fait que tu connaisses ta maison par coeur et ainsi, tu sais parfaitement quoi faire pour être la plus silencieuse possible. Chaussures et veste retirées, tu peux te faire un petit déjeuner rapide avant d’aller t’isoler dans ton lit pour une nuit tardive. Seulement la présence de ta mère, tu ne l’avais pas prévu, et te retrouver face à elle te surprend plus que de raison. Evidemment, la première chose qu’elle te dit est une remarque qui te fait lever les yeux aux ciel. Chaque fois que tu oses dire un gros mot en sa présence, elle fait comme si c’était la fin du monde, une catastrophe planétaire, alors que toi ça ne te fait plus réagir. Tu reprends la parole cependant, ne t’attardant pas sur cette erreur de parcours, tu entames une conversation avec celle qui t’a donné la vie. Avec le temps, tu as développé certaines techniques pour te sortir des situations difficiles. Ton choix de remarque n’était pas forcément le meilleur, il est vrai que ta mère est bien plus matinale que toi et tu auras du mal à lui faire croire le contraire. « Bah j’étais là. J’ai lu dans mon lit, et je me suis couchée tôt. Et là… je sais pas, je n’arrivais plus à dormir alors je me suis habillée et je suis descendue prendre un ptit dej. » Mensonge éhonté que tu oses prononcer en regardant ta mère dans tes yeux. Il y a quelques années, jamais tu n’aurais imaginé agir de la sorte un jour. Pourtant te voilà, un air de fausse incompréhension sur le visage. « Tu pensais que j’étais où ? » En réalité, tu te sens un peu mal de savoir que ta mère a remarqué ton absence. Tu la connais, elle s’est sans doute inquiéter bien trop rapidement pour pas grand chose. Tu l’imagines bien, passer la nuit entre prier pour que tu n’aies rien, et rêver que tu sois un peu plus docile. Mais il est trop tard pour faire marche arrière à présent, tu t’es lancé dans une histoire gargantuesque, plus qu’à continuer.

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@austyn walters

Cette demeure familiale baignée par les rayons du soleil, annonçant une nouvelle journée. Bonne pour certaine personne, mais peut-être pas aussi belle chez les Walters, où une mère n’avait cessé de faire des rêves anxieux à propos de sa fille abonnée aux absentes. Elle aurait pu profiter d’une nuit agréable dans le confort des bras de son mari au lieu de la passé étendue sur le canapé du salon. L’horloge avançant à petit pas, laissant se multiplier les cauchemars, ces idées sombres l’envahissant. Elle aurait pu être soulagée en se levant et remarquant les souliers de sa fille près de l’escalier. Un soulagement aurait pu l’envahir, mais ne ce laissait pas bercer d’illusion, alors qu’elle était bien consciente que depuis son engagement avec Sasha, ils subissaient les intempéries diriger par ses enfants. Tornade ou véritable ouragan, ils agissaient comme des garnements, l’épuisant, alors qu’elle tentait d’être compréhensive face à cette situation, mais personne ne semblait regarder de son point de vue. Seul Sasha l’avait vu pleurer après ces énièmes disputes où elle en venait à se demander si elle était une bonne mère, si elle n’avait pas commis d’erreur quelconque pour que ses propres enfants ne parviennent pas à accepter son choix. Voyant sa fille livrer bataille ainsi, mettant Shiv face à une catharsis flagrante, ce combat entre bien et mal. C’était épuisant. Observant sa fille, elle resserrait son châle sur ses épaules. Elle aurait pu croire ces propos, elle aurait aimé les croire. Voir sa fille lui mentir, lui brisait le cœur. Elle aurait pu s’emporter, c’est surement ce qu’elle aurait fait si elle n’était pas aussi épuisée. Poussant un soupir, elle passait une main dans ses boucles défraîchi signe qu’elle ne s’était pas apprêté comme elle en avait l’habitude avant de descendre. Elle faisait la lecture une dernière fois des traits de sa fille. Avançant dans la cuisine, elle s’approchait d’un vase aux tournesols et tubéreuses flétries pour les jeter dans le compost. Gardant le silence, elle allait moudre les graines de café pour se préparer une tasse. Avait-elle un motif assez puissant pour réellement s’inquiéter ? Pas vraiment. Mais voir son petit oisillon qui demandait de la liberté, la voir grandir, s’approcher des apparences d’une femme, la terrifiait tout autant que son acharnement contre Sasha. Elle n’avait toujours rien ajouté, ses orbes fixés sur la mosaïque de céramique, elle réfléchissait, avant d’appuyé sur le bouton start de la machine à moudre le café. Doucement, elle se tournait vers Austyn, s’approchant et venant délicatement poser sa paume contre la joue de la jeune fille. Descendant d’un ton, elle laissait son regard être le miroir de ses pensées. Sans qu’elle ne lui dise, elle laissait voir sa déception. Comment tout ceci avait pu prendre la tournure d’une dystopie, inondé leur foyer, ce cocon pourtant si chaleureux. « Bon si tu le dis… » disait-elle alors qu’elle doutait plus que de raison de tout ceci. « J’ai toujours eu confiance en toi, pourquoi me mentirais-tu ? » continuait-elle en tentant de sourire, cette confiance s’évaporant à mesure qu’elle gardait son regard dans les prunelles de son enfant. Inutile de sévir, c’est ce que Siobhan ce disait, alors que l’épuisement avait raison d’elle. Retirant sa main, elle regardait un instant encore sa fille, lui pointant finalement la vaisselle sale. « Puisque tu n’étais pas là hier et que tu étais de corvée. Tout ceci t’attend encore. » disait-elle en retournant à son café, en poussant un soupir. Elle ne possédait peut-être pas le dialecte des adolescents, mais celui des parents, elle en avait les capacités et avait toujours – ou tout du moins jusqu’à présent – eu une facilité à ce faire comprendre. « Tu ne sors pas tant que tu n’as pas fait toutes tes corvées. » disait-elle, se fichant que sa fille avait joué au petit chaton rebelle en passant sa nuit dehors. « Ne me déçoit pas. » ajouta-t-elle bien consciente de ce qu’elle disait.

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âge : trente-cinq ans - 20.08.1987.

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@Siobhan Caldwell & @Austyn Walters
Tu n’es plus aujourd’hui l’oisillon doux et innocent que tu étais encore il y a quelques mois. A te voir ainsi aujourd’hui, n’importe qui te prendrait pour un garnement de la pire espèce, un rejeton qui n’hésite pas à mentir à sa mère en la regardant droit dans les yeux. Tu n’en es pas très fière, mais au fond de toi tu sais que c’est pour son bien. Le simple fait de te savoir dehors toute la nuit la ferait paniquer pour des détails et ce n’est pas ce que tu cherches. Tu n’es pas blessée, tu n’es pas malade, personne ne s’en est pris à toi. Tu vas aussi bien que lorsque tu as quitté la maison la veille au soir et cela, il faut bien qu’elle s’en rende compte. Si tu lui mens, c’est donc seulement pour la protéger elle, pour ne pas créer encore plus de tensions entre vous. Le silence qui règne dans la cuisine ne te met pas à l’aise cependant, tu ne comprends pas pourquoi elle ne dit rien. Après t’avoir fixé pendant de longues secondes, elle s’occupe des tournesols et tubéreuses, puis du café qu’il faut moudre. Tu continues à manger tes céréales malgré tout, regardant d’un air anxieux ta mère s’affairer dans la cuisine. A vrai dire, tu attends l’intempérie. Ces derniers temps, la plupart de vos conversations se sont terminées en disputes orageuses et tu ne vois pas pourquoi celle-ci serait différente. A moins que, bien sûr, elle te croit. Surprise, tu arrêtes de mâcher lorsqu’elle pose sa main sur ta joue. C’est un geste doux, qu’elle a eu si souvent par le passé. D’habitude cette proximité te rassure, te plaît, mais en cet instant, tu te sens sondée par son regard. Tel un agent de police en salle d’interrogation, elle analyse ton visage, cherche la moindre faiblesse. Et finalement, elle te laisse libre. Ses mots devraient te soulager mais ils t’angoissent encore plus. Tandis qu’elle se détache de toi pour retourner à son café, tu t’appliques à avaler ta bouchée de céréales. Ce qu’elle te dit résonne à tes oreilles et, peut-être est-ce seulement un effet de la fatigue, mais ta tête commence à tourner. Faire la vaisselle n’est qu’une punition bien moindre par rapport à celle que tu lui fais subir. Elle te fait confiance, elle vient de te le dire et tu es en train de tout ruiner. Alors qu’elle te demande de ne pas la décevoir, tu prends soudainement peur qu’elle quitte la pièce et mette fin à votre conversation. « Maman, attends ! » A l’instant où ces mots passent tes lèvres, tu le regrettes déjà. Tu ne peux plus faire marche arrière maintenant que tu as fait en sorte de la retenir, et tu n’arrives pas à penser à une autre excuse. Les rouages de ton cerveau ne fonctionnent qu’au ralenti après cette nuit blanche. « Ecoute, je… je n’ai pas vraiment dormi ici cette nuit. Je n’ai pas dormi du tout en fait. Je suis allée à une fête, avec des copains du lycée, mais je te jure que tout va bien ! Il ne s’est rien passé, je suis juste fatiguée mais c’était une bonne soirée. Et je suis rentrée maintenant. » Maladroitement, tu lui lances un beau sourire innocent, comme pour nouer ces belles paroles avec un ruban. Tu ne lui donnes pas les détails, tu ne lui dis pas certaines personnes buvaient, fumaient et s’embrassaient un peu trop fougueusement, parce que tu n’en vois pas l’intérêt. La rassurer est une chose, mais tu ne veux certainement pas lui donner plus de clés pour empiéter dans ta vie privée. « J’ai rien dit parce que je ne veux pas que tu t’inquiètes, il n’y a pas de raisons de s’en faire. » On pourrait croire que les rôles sont inversés, que tu es l’adulte essayant de rassurer un enfant qui s’inquiète pour pas grand chose. Mais ta mère est loin d’être une enfant, elle est loin d’être idiote aussi, tu espères simplement que cette fois cela passeras. « Je vais faire la vaisselle, promis. Est ce que je peux juste faire une mini sieste avant ? » Tu tournes ta tête vers l’horloge accrochée au mur. Il ne te faut pas forcément très longtemps, mais si elle pouvait t’accorder une heure ou deux de sommeil, ainsi qu’une douche pour ne plus avoir la sensation de sentir le pélican rugueux, tu serais bien plus efficace dans l’accomplissement de tes tâches.

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@austyn walters

Élever des enfants c’était une chose dont Siobhan avait dû apprendre par elle-même. Elle ne considérait pas avoir eu une enfance facile, ni une éducation des plus adéquate. Ce n’était peut-être pas l’éducation la plus terrible qui soit, peut-être n’avait-elle pas à se plaindre ? Mais trop longtemps elle avait été sous l’emprise de sa grand-mère. Une situation difficile, lui obéissant au doigt et à l’œil. Ses pensées, elle devait les garder pour elle. Si elle en souffrait, elle ne pouvait le dire, c’est silencieuse que la rousse avait affronter tout cela. Shiv en avait empathie, vivant péniblement ces années de poupée. Son image, ses imperfections, lui étaient révéler tous les jours dans le miroir. Encore aujourd’hui, lorsqu’elle se regardait dans la glace, elle entendait sa grand-mère lui faire des reproches, elle y répondait encore, relevant le menton ou replaçant une mèche de ses cheveux de feu qui retombait sur son front. Des traumatismes tenus secrets depuis tellement d’années que même ses enfants en ignoraient leur existence, mais Shiv ne désirait en aucun cas qu’ils vivent un quart de ce qu’elle avait enduré. Un combat qu’elle livrait difficilement dans leur jeunesse, mais aujourd’hui, ils étaient grands. Avait-elle en s’en inquiéter ? Pour tout dire s’il n’y avait eu que cela… Repousser une femme qui hantait ses pensées et voyait tout le potentiel de ses enfants. Non, il n’y avait pas que cela, devenir mère monoparentale n’avait jamais été dans ses projets de vie. Comme beaucoup, elle avait imaginer la petite famille parfaite. Elle l’avait rêver un nombre de fois incalculable, mais son chemin était tout autre. Gardant la tête haute, repoussant ses limites, confrontant les attentes d’une société qui voyait d’un mauvais œil une femme seule élever ses enfants, elle aimait à croire qu’elle avait tout donner, faisant de son mieux pour qu’ils ressentent tout son amour à leur égard, les encourageant lorsqu’il le fallait, les punissant avec difficulté lorsqu’elle jugeait cela nécessaire. Elle avait bravé les années comme elle le pouvait. Personne pour lui dire qu’elle faisait tout de travers. Une chose qu’elle ne pensait – pour tout dire – et pourtant en regardant sa fille, elle se demandait si elle n’avait commis des erreurs. Était-elle une si mauvaise mère ? Ça lui arrivait de se poser la question, mais n’en disait jamais rien. Gardant le silence, Shiv continuait de vaquer à ses occupations matinales. Mettant le café fraîchement moulu dans la cafetière pour ainsi lancer son nectar favori, qui lui apporterait un peu de douceur, réveillant son esprit encore embrumé par sa nuit pratiquement blanche. La voix de sa fille résonnait dans l’accalmie de la pièce, faisant se retourner la mère. Haussant un sourcil, attendant la suite. Elle n’avait pas idées si celle-ci désirait continuer à lui mentir ou si au contraire elle préférait rattraper le coup, revenir sur ses paroles. Étrangement, Siobhan possédait une quelconque réserve sur ce fait. Voir Austyn agir comme elle le faisait depuis quelque temps, elle n’aurait pas été surprise que cette dernière continue de lui mentir impunément. Il en fut tout autre chose. Écoutant sa cadette, elle tentait de garder son calme. Avec son épuisement, c’était pas du plus simple. Un soupir s’échappait de ses lèvres malgré tout. Ne pas s’inquiéter… « Tu ne crois pas que justement je me suis inquiéter cette nuit en ne sachant pas où tu te trouvais ? » disait-elle lorsqu’Austyn eut fini de parler. « Je suis ta mère. Je m’inquiéterai toujours pour toi… » Elle marquait une pause. « Je n’ai rien à faire que tu ne me trouve envahissante… » Elle humectait ses lèvres charnues, elle savait que ce n’était pas ce qu’elle devrait dire, mais il y avait déjà tellement de chose qu’elle aurait aimé dire. Seulement, elle devait retenir ses mots, c’était elle après tout l’adulte. Elle qui devait faire preuve de maturité. Inspirant, elle reprenait : « J’ai aussi été jeune, à ton âge on veut découvrir le monde, expérimenter plusieurs choses et je sais aussi que ce n’est pas facile en ce moment. Notre vie de famille a changé, mais je serais toujours ta mère, et tant que tu seras sous mon toit, tu as un couvre-feu à respecter. » Sa main venait se passer dans ses boucles défraîchies. « Tu dois me prévenir. » Shiv avait la sensation de ne pas être si terrible, même elle prévenait sa fille les soirs où elle rentrait tard à cause du son boulot. Ça ne prenait que deux secondes et évitait tellement d’histoire, de fausses craintes. La dernière goutte de café tombait dans le récipient. Elle sortait une tasse de café. « Tu peux aller faire une sieste, mais si tu ne fais pas tes corvées après, tu seras punie. » Prenant sa tasse remplie, elle venait faire face à sa fille. « Je t’aime ma chérie. » Ses lèvres se posaient sur le front de son enfant. Elle savait qu’Austyn ne serait pas en accord avec tous ses propos, mais plus tard elle comprendrait. Sur ce geste tendre, la quarantenaire quittait la cuisine pour monter à l’étage se préparer pour sa journée.

fin

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