(jamja) elle marchait comme un chat, méprisant sa proie.

[ elle marchait comme un chat,
méprisant sa proie. ]

Anja & Jamie
Ce soir, Anja, elle avait envie de tout plaquer, d’envoyer en l’air ce qui lui restait de travail et prendre le temps dont elle nécessitait pour se reposer. Les nerfs constamment à vif, son patron qui l’agaçait, Anja partait du principe qu’elle ne changerait pas sa manière de travailler, qu’elle gérerait mieux en étant indépendante. Peu de pression ni de collègues insupportables, cela lui semblait bénéfique pour ses prochaines années de vie. Anja, elle broyait trop souvent du noir, toujours à se plaindre et à râler, ne supportant plus rien ni personne : boule de nerfs ambulante, se débattant sur des jambes qui n’allaient pas tarder à la lâcher. Alors, ce soir, comme beaucoup trop depuis quelque temps, elle s’aérait l’esprit, la panthère : habillée comme à son habitude, dans une tenue féminine, élégante et perchée sur des talons aiguilles, lui offrant davantage de caractère. Elle optait pour un perfecto en cuir par-dessus sa robe portefeuille à l’imprimé léopard et un chapeau fedora sur le sommeil de son crâne, la mine toujours fermée. Anja n’était pas souvent heureuse, depuis toujours, elle faisait la tête, n’assumait pas ses carences affectives et la vie de merde dans laquelle elle avait grandi. Au fin fond de son âme morose, la brune désirait trouver quelqu’un qui l’aimerait enfin et qui égaierait ses journées, mais sa fierté la poussait à montrer constamment le contraire. Anéantie, piétinée par une existence des plus désastreuses, Anja, elle se sentait affreusement mal, un peu plus chaque jour, sans vouloir poser des mots sur ses maux. Alors, elle se comportait constamment de la même manière, repoussant au lendemain des problèmes qui pouvaient être résolus. Lentement, démarche des plus féminines, elle se rendait à un concert du coin, bien que seulement l’alcool à outrance l’attirait, ponctué d’un fond sonore. Non, ce soir, Anja n’était pas dans son assiette, se faufilant immédiatement au bar où elle commandait des verres d’alcool pur, brut. Et son attention déviait sur cet homme, à l’accent marqué, qui lui arrachait un sourire, tandis que la belle sortait de son mutisme, pour lui adresser quelques paroles cinglantes, à seulement quelques sièges d’elle. « Encore un bourge qui sort de sa caste… » Parce qu'elle les reconnaissait, les gens comme elle. C’était sa technique d’approche, le passif-agressif, avec un rictus taquin au coin des lèvres, sans le lâcher du regard, lui adressant son verre pour ensuite le porter à ses lèvres.

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Anja & Jamie
À l'aube de mes premiers jours en Louisiane, alors que je survolais encore les eaux internationales depuis la business class d'un avion long courrier, je me fis la promesse de ne revenir en Ecosse qu'après avoir fait un choix cornélien : reprendre les rênes de la compagnie familiale ou m'émanciper définitivement de mon patronyme pour, enfin, me sentir aussi libre que l'oiseau de ~~mauvaise~~ bonne augure que j'étais. J'arrivais à un moment charnière de ma vie, un de ces checkpoints qui vous garantit de ne plus jamais revenir en arrière. Aujourd'hui, à des milliers de pieds de ma terre natale, je m'apprêtais à fouler le sol d'un chemin initiatique inédit : la voie vers, peut-être, un nouveau monde. Une promesse que la Nouvelle-Orléans, berceau du jazz, portait à merveille. À peine quelques heures après avoir posé mes valises dans un hôtel de la ville, je fus gratifié de quelques notes suaves d'un saxophoniste de rue. Une belle surprise que je n'aurais pu trouvé nulle part ailleurs, et que je pris comme le meilleur bienvenue qui soit. Et le schéma se répéta, inlassablement, délicieusement, chaque matin. Mon amie Megan ne m'avait pas menti : cette ville était unique. Cela faisait bientôt deux semaines que j'appréhendais ses traditions, ses mystères et... ses nuits endiablées. À deux pas du Marriott International Louisiane dans lequel je séjournais, j'eus la joie de découvrir une petite salle de concert. Sans prétention, elle explosait par la liberté qu'elle offrait tant à son public qu'à ses artistes. Une forme de musique sans limite qui me faisait de l'oeil depuis plusieurs jours, et que je me décidai enfin à déguster en solo. Il n'était pas tard, si bien que l'ambiance commençait tout juste à se réchauffer lorsque je m'installai au comptoir. Mes doigts pianotaient sur l'ébène du bar, attendant impatiemment d'enlacer un verre de vin, lorsqu'une voix, plutôt sèche, m'interpella. Je tournai le regard vers l'objet de mon interrogation et le posai, avec étonnement, sur une intrigante jeune femme. Belle à en crever, donc sûrement chiante à en mourir. « Je prends ça pour un compliment. » répondis-je sur un ton arrogant, avant de lui commander discrètement un verre. Quand le serveur déposa son graal devant elle, des rictus fiers et vengeurs se dessinèrent sur mes joues. Les répliques acerbes adoucies par un sourire charmeur, c'était ma botte secrète, le meilleur moyen que j'eus trouvé à Edimbourg pour surmonter l'épreuve des faux-semblants des réceptions aristocratiques. « À la vôtre ! » Des compétences qui me seraient sûrement précieuses pour séduire cette brune au caractère bien trempé à qui j'adressai un sourire entendu.

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Anja & Jamie
Anja, elle se sentait vide, dépourvue d’émotions et de sentiments, le palpitant qui battait uniquement pour sa survie sur terre, s’ancrant sur une planète où elle ne s’était jamais sentie à sa place. Parfois, il lui arrivait de craquer, d’enrichir ses songes de pensées négatives puis de tout gommer, effaçant sa peine quelques heures plus tard. Les moments nocturnes, Anja en profitait constamment pour se vider la tête, malgré le côté éphémère de la chose, ça lui faisait du bien. Se frayant un chemin au milieu de la foule déjà massive puisque l’heure du concert approchait, Anja s’accoudait au bar en s’installant sur un des sièges. Pour l’heure, le bar était particulièrement bondé, à l’affût des premières bières pour se plonger dans l’ambiance, être moins pudique, plus démonstratif, profiter un maximum de l’environnement. Et la belle regrettait déjà sa présence, consciente que ce ne serait pas la meilleure soirée de sa vie en tenant compte de son humeur assez basse. Mais, il y avait un peu d’espoir, lorsque ses mirettes châtaigne se posaient sur l’homme à ses côtés, détaillant rapidement ses traits, en tant que parfaite observatrice. La réplique cinglante, Anja lui adressait sa plus épineuse des phrases, la répartie semblable au venin d’un serpent. Pourtant, elle fut surprise de découvrir une répartie identique à la sienne, si bien que la poupée ne pouvait pas s’empêcher de renchérir. « Et en plus égocentrique, quel cliché. » Se retrouvant avec deux verres en main, Anja pivotait légèrement pour se confronter à son regard, buvant le contenu de sa commande, les prunelles rivées sur son partenaire. « Je ne vois pas d’alliance, j’imagine que tu n’es pas encore totalement foutu. » Il y avait des signes qui ne trompaient pas chez les enfants de fortunés, le port de la tête, le dos droit, les bonnes manières et le désir de toujours vouloir charmer, se faire désirer, prouver que l’on pouvait plaire. C’était le cas pour elle, imaginant que ce serait réciproque chez l’homme, qu’elle ne lâchait pas une seule seconde du regard, le rictus aux lèvres, divertie, intriguée.

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Anja & Jamie
Je ne pus retenir un rictus amusé lorsque la brune renchérit d'une manière presque agressive qui contrastait sévèrement avec son visage angélique. Fermé, certes, mais dont la douceur des traits laissait supposer qu'il s'y cachait bon nombre de qualités. J'étais bien loin de les voir, ces qualités, à en juger par l'argumentation amère qu'elle enchaînait et l'attitude féline qu'elle dégageait. « Égocentrique, vous dites ? Hm, je pense qu'on l'est tous un peu. » Un haussement d'épaules las mais assumée, je pensais au nombre incalculable de fois où cette remarque m'avait été adressée. Sans doute était-ce le lot des aristos. « Vous par exemple. » Je tournai le regard vers la brune au bagout. « Voilà à peine deux minutes que nous discutons et déjà, vous m'avouez sans détour avoir jeté un oeil à mon annulaire. Si ce n'est pas pour attirer pleinement l'attention... » Pardonnez-moi l'expression, mais à première vue, cette jeune femme semblait entrer dans la catégorie des croqueuses de diamants. Celles qui passent leur temps dans les bars, les casinos et tous autres lieux de réception pour flairer le bon filon et espérer attraper le gros poisson qui mettra des paillettes dans sa vie. J'avais souvent eu à faire à ces femmes-là, jouant de leurs charmes jusqu'à s'en ridiculiser pour attirer mon regard et espérer, avec une extrême ferveur, obtenir les faveurs d'un jeune aristocrate... une alliance et sa fortune. Et pourtant, le plan de cette jeune femme semblait assez inédit. Jamais je n'avais eu l'occasion de jouer face à une joueuse au tempérament de feu, une passive-agressive qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et qui, étrangement, avait gagné mon intérêt dès sa première réplique incisive. Qu'elle soit ou non en quête de quelque chose, cette femme m'intriguait. « Je dois me résoudre à vous avouer que cela fonctionne. » finis-je par dire en pivotant mon corps vers elle, à quelques sièges de moi, le bras accoudé sur le bar. Armé de mon sourire le plus charmeur, je levai légèrement mon verre de whisky vers le ciel.

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Anja & Jamie
Elle claquait d’un geste sec son muscle rosé contre son palais, l’air satisfait et l’expression féline qui ne quittaient pas un seul instant ses traits amusés. Il était presque certain que la belle avait trouvé un adversaire à sa taille, dans l’analyse et la répartie, sans tourner autour du pot, qui ne semblait pas être sous le charme de son minois agréable, de sa fausse gueule angélique. Anja, on lui résistait difficilement et ça l’arrangeait, mais au fond d’elle, elle se sentait bien trop seule, le coeur démuni à la manière d’une coquille nue. Le contraste la frappait, heurtait son palpitant qui s’animait lorsque son regard croisait celui de Jamie, une étreinte fusionnelle qui ne s’éteignait pas, non. Un lien établi, en seulement quelques secondes, c’était électrique, mais également tendu entre eux. Indescriptible, même. Sa paume libre venait se déposer contre son plexus solaire, de manière à afficher un air faussement outré, la condescendance jamais loin. « Moi ? Je l’assume pleinement. » Pour sûr, Anja assumait chaque détail de sa personnalité, mais uniquement les mauvais de sa personne. Ses failles et ses faiblesses restaient camouflées, cachées derrière son sourire, son attitude prédatrice, la confiance exubérante pour en jeter, pour assurer, mais aussi pour éloigner. « Je sais comment attirer l’attention, Monsieur. » La voix qui s’éteignait dans un murmure, Anja déposait son visage sur l’intérieur de sa paume chaude, les mirettes pétillantes, sans que rien ne disparaisse, même pas son sourire étincelant. Elle finissait par se lever, en faisant résonner le bruit de ses talons, Anja s’approchait de l’homme, en prenant place juste à côté de lui, une marche lente, assurée, enivrante. Une proximité physique qui s’intensifiait, son enveloppe charnelle le frôlait, au même titre que son visage, suite au peu d’espace présent entre les chaises hautes. « Parle-moi de toi. » Que ses lèvres susurraient en s’installant, ses jambes croisées entre celles de l’homme, son regard châtaigne qui ne quittait pas le sien. Le monde pouvait bien s’effondrer autour d’eux, Anja, elle s’en fichait, captivée, intriguée, comme elle ne l’avait jamais été auparavant.

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