~ She made me a millionaire ~ Maja

Une réunion parents-professeurs. Une simple enveloppe et quelques instructions sur une feuille de papier. Loin d'être la première qu'il reçoit; le réflexe reste pourtant le même à l'arrivée: un franc et fier sourire sur ses lippes. Le regard s'attarde forcément sur la demoiselle, jouant dans le salon. Sa garde implique bon nombre de responsabilités, mais Derwin y prend le plus simple des plaisirs. Grand frère il est, grand frère il restera à jamais. Jeune fille aux ambrées claires et au sourire encore innocent; Ambre, la raison du moindre de ses agissements. - En route gente dame, on va finir par être en retard ! l'index désigne les aiguilles de la montre et la voilà qui se relève, pimpante et joyeuse comme à son habitude. - Même si on l'est, je dirai que c'est ta faute. réplique-t-elle avec malice avant de courir jusqu'à l'entrée de la maison. - C'est tellement facile d'accuser les grandes personnes quand on a un visage d'ange.. soupir amusé du ténébreux, baiser déposé sur le front de la gamine avant qu'il ne referme la porte derrière eux.

L'école du nouveau départ. Ambre devrait suivre les prochaines années de sa scolarité dans cet établissement. Un semblant de stabilité, pour lui permettre de se construire et de réellement établir quelques relations sociales. L'être humain est fait pour se construire au travers d'interactions, et Derwin est conscient de ne pas être suffisant pour combler ces besoins. - J'ai oublié la convocation à la maison.. peste-t-il contre lui-même tout en fouillant le sac de fond en comble. - Sûrement avec les autres papiers qui attendent toujours d'être rangés.. Mmh ? l'expression le désignerait comme "père indigne" mais Derwin n'occupe pas vraiment cette fonction. Quelques minutes plus tard, c'est cette réalité qu'il tente d'expliquer à l'homme lui faisant face. Mais comment pourrait-il comprendre le point de vue d'un gamin de vingt-quatre ans, tout juste assez mature pour s'occuper de sa propre personne ? Victime des préjugés, encore et toujours.

Entretien peu concluant, débouchant tout de même sur la réponse positive à l'admission de sa soeur. Le reste ? Don't care. A peine sorti, Derwin rêve déjà de retrouver le plein air; de fuir loin de cette paperasse, aussi pénible que compliquée à remplir. Et puis, des rires d'enfants l'interpellent. Un petit groupe aux faciès joyeux, en train de jouer les uns avec les autres. Le regard s'abaisse, rencontre celui de sa soeur et il n'en faut pas plus pour qu'il comprenne. - On a le temps. Va t'amuser. ivoires découvertes en lui offrant un nouvel éclat de joie, le jeune homme l'invite à filer pour rejoindre les rangs de l'innocence. - Tu sais.. T'es pas un papa, mais tu t'en rapproches quand même. Genre.. A quelques rides près, tu vois ? la douceur et la taquinerie; le subtil cocktail de la complicité. Derwin l'observe un instant, et arrive même à l'envier. Avant de se reprendre et de s'asseoir, en plein milieu du couloir, adossé au mur. Formulaires sortis de la pochette, stylo bille entre ses phalanges, le jeune homme tente de prendre les choses en main. - Okay, je suis complètement paumé. J'abandonne pour aujourd'hui. une pointe de frustration, rien de bien méchant. Juste l'impression de ne pas être "assez". Ne pas être vraiment parent, c'est bien là que réside le fond du problème.

she made me a millionnaire @derwin ramsey

Elle aimait pas ça, quand elle était ado, les réunions parents-prof' où on jugeait d'sa qualité sur la simple base de ses résultats scolaires, de son assiduité lors de cours qu'auraient eu du mal à intéresser le plus studieux des élèves. L'école et elle, de manière générale, ça n'avait jamais été vraiment ça, sauf les jours où elle avait cours avec Mr Stone, qu'son désir et son intérêt pour l'art et la création dépassaient son envie d'échapper à l'ennui global des cours. Pourtant, Maja avait ravalé sa fierté et enfilé cet ensemble qu'avait à la base été choisi pour accompagner le rendez-vous galant d'une autre jeune maman, tissu qui n'a de noble que l'apparence et qu'est censé dissimuler au regard d'ceux qu'éduquaient sa fille qu'elle était rien de plus qu'une mère perdue et dépassée - surtout en ce moment. Cette première année de collège avait aussi été la première vraie tentative de Maja d'ramener une vraie normalité et une tranquillité dans la vie et le quotidien de sa fille ; pas sûre d'aller dans la bonne direction, maman, mais besoin d'avancer quoiqu'il arrive, d'tourner la page sur l'fantôme d'une vie qu'avait finalement jamais vraiment connu sa concrétisation, qui n'avait été que promesses noyées sous les caresses qui l'avaient endormie.

Elle peut pas retenir un petit soupir quand, enfin, elle sort de la salle de classe transformée en tribunal amateur. Fin du calvaire et jugement rendu : un peu rêveuse, Nayeli, et un poil trop sanguine pour le bien de ses camarades les plus taquins. Elle avait déjà entendu ça quelque part... Et franchement, c'était titiller pour des broutilles quand, à côté, ses notes étaient plus que correctes et qu'en sortant du rendez-vous, Maja remarque que sa fille s'entend parfaitement bien avec quelques-uns de ses camarades de classe, qui jouent un peu plus loin. La petite brune relève la tête en repérant sa mère, qui la rassure d'un geste de la main qu'elle peut continuer de jouer encore un peu, et elle en profite pour sortir son portable de son sac ; et après quelques messages envoyés à sa soeur, son doigt ripe sur le coin du téléphone alors qu'son esprit part vers le père de la petite, vers ces considérations scolaires qui l'intéresseraient sûrement même pas.

Et pendant ce temps-là, l'jeune homme qu'avait le créneau de rendez-vous suivant laisse sa gamine - qui n'l'est pas, apparemment, et qui a l'bagou pour le noter, d'quoi faire discrètement pouffer Maja de rire alors qu'elle prétend encore être absorbée par l'écran de son téléphone - et s'assied à quelques pas d'elle, une pléthore de papiers déjà froissés entre les mains. Et, après les avoir observés un instant, son abandon fait de nouveau brièvement rire Maja, d'façon plus remarquable cette fois. Elle a raison elle déclare en prenant les devants quand son regard croise celui du brun, vous avez déjà tout d'un parent... on a tous été comme ça, face à leurs formulaires et leurs sigles tous les deux mots. Elle roule les yeux, s'souvenant encore trop bien des quelques tresses qu'elle a bien failli s'arracher au moment de l'inscription d'Eli dans ce collège. Besoin d'aide ? elle demande, sautant sur l'excuse de ranger son téléphone, de n'pas avoir à penser à celui qui n'quittait que trop peu ses pensées, avant de désigner sa petite tête brune un peu plus loin. Ma fille termine sa première année ici, j'ai été rodée à l'exercice, alors si j'peux être utile... elle précise, sourire avenant d'la mère au fond toujours bienveillant.

C'est tout sauf un jeu d'enfant, d'avoir la charge d'un môme. Chaque décision de chaque journée est prise par rapport à une petite personne; en tenant compte de ces besoins et envies. Réussir à se faire une place personnelle dans un tel schéma relève du défi, et c'est probablement l'unique point sur lequel Derwin bute encore. L'adulte a tendance à s'oublier, pour que l'enfant puisse continuer de rêver. Le ténébreux était persuadé que les choses changeraient un peu en débarquant à la Nouvelle-Orléans, puisque leur niveau de vie s'est élevé à la signature de son "rookie deal". Mais au contraire, c'est pire. Son passage dans le monde du football professionnel a entraîné des ajustements, du genre qu'on ne peut pas prévoir à l'avance. Nouveau rythme de vie, nouvelles attentes, nouveaux paysages et habitudes à prendre... Tout semble donc à refaire en Louisiane. Heureusement pour lui, Ambre est probablement la petite la plus facile à vivre, et la plus compréhensive qui soit; deux atouts quand on ressemble à un Derwin dépassé.

Assis au sol, perdu entre ses pensées, doutes et formulaires à remplir, il n'entend même pas la jeune femme qui pointe son nez, à proximité. Le regard se relève, croise et accroche les ambrées de son aînée; une véritable mère sans doute. Et la première à lui offrir pareil compliment. Sensation étrange qui le consume, comme un poids qui s'enlève de sa poitrine; peut-être un léger regain d'estime pour le travail accompli depuis plusieurs années déjà. - Pourtant.. J'ai toujours l'impression d'être à côté de la plaque. J'veux dire... Je cherche encore le mode d'emploi de "parent, mais pas vraiment non plus". les ivoires viennent mordre la langue, la tête se secoue en signe de frustration. Sans vraiment savoir pourquoi il lui raconte tout ça, à cette inconnue qui pourrait l'prendre pour un pauvre gosse paumé; celle qui pourtant, semble vouloir lui offrir un peu d'humanité. - Si ça ne vous dérange pas.. Merci. honnêtement, c'est tout ce dont il avait besoin, à cet instant. Cette maman va peut-être lui éviter quelques nuits blanches, à comprendre et remplir tout ces papiers, pour être certain que la petite Ambre ne rencontre aucun problème à l'école. - Je m'appelle Derwin. Derwin Ramsey. Et je.. Je suis le frère de la petite, là-bas, Ambre. main tendue dans sa direction, sourire en renaissance sur ses lippes tandis que le regard désigne un instant le petit groupe d'enfants, jouant les uns avec les autres. - Peut-être qu'elles seront dans la même classe.. J'aimerai bien que ma soeur trouve des points de repère ici. à supposer que la fille soit à l'image de sa mère, et cela pourrait faire une solide base pour Ambre. Tout comme pour lui finalement. Parce qu'il le sait Derwin; rien ne peut rivaliser avec la véritable expérience d'une maman.