everything's embarrassing (charlie)

Elle était venue avec un ok rapide par message de Charlie, son éternel sac à dos sur les épaules avec son éternel alcool et ses éternels joints, les yeux rougis par les larmes, la fatigue et le manque de sommeil tout réunis ; elle n’avait pas prononcé un mot, depuis qu’Ida avait quitté son appartement, et elle n’avait pas non plus tenté d’envoyer un autre message à Victoria après la salve d’une vingtaine envoyée la veille, sans retour non plus. Elle le savait : ç’avait été la pire des décisions, de se réfugier auprès d’Ida pour penser autre chose ; au mieux une décision blessante et foncièrement stupide pour elles deux (voire troisà, au pire un geste affreusement égoïste, enraciné dans un besoin puéril et inexplicable de vengeance basée sur une satisfaction personnelle malsaine. Elles avaient passé la nuit ensemble sitôt la nouvelle tombée, elle s’était nourrie de l’amour qu’Ida pouvait lui porter pour combler les plaies béantes qui ne se refermaient plus dans son coeur, elle avait laissé toute réflexion à la porte pour ne plus les retrouver avant maintenant.

L’air est froid et sa mâchoire travaille à lui en coller une putain de migraine. Elle a dormi trois heures au plus, baisé le reste et pleuré entre les deux ; aucune satisfaction ni fierté, rien de plus qu’un énorme vide qui pèse et l’étouffe. La conversation de l’avant-veille avec Victoria lui reste sur le cœur et jusque dans la gorge. C’est le souvenir de son regard, surtout, de la trahison qu’elle y a lu et de la peine irréversible qu’elle aurait été infoutue d’apaiser avec toutes les preuves du monde. Elena se retrouve face à ses peines et ses erreurs et même là, elle ignore quoi en faire. Ne reste qu’à les décharger sur Charlie, rien qu’un peu ; à moins que ce ne soit histoire de se prendre sa rétribution karmique de la part de quelqu’un d’externe, pour en souffrir un peu plus. Charlie l’a assez mise en garde, a assez eu de détails et de points pour lui dire je t’avais prévenue et finir de l’achever.

Mais ça ne vient pas, ni sur le pas de sa porte ni quand elle s’effondre dans son canapé sans bonjour ni merde, simplement avec un regard plein de détresse qui se fige sur l’écran de télévision sans en bouger. Ni sur Charlie, ni sur Korra qui pose son museau sur sa jambe pour lui demander un peu d’attention. « I massively fucked up, Charlie », finit-elle par lâcher après un silence trop long et étouffant, et malgré le temps qu’elle a mis à prendre sur elle, elle sent un sanglot lui serrer la gorge et les larmes menacer de couler à tout moment. « Like in a monumental, irreversible way. » Sa mâchoire se contracte à nouveau pour retenir les larmes ; la culpabilité l’étreint jusqu’à l’étranglement, ses yeux faisant le zig zag entre la masse poilue blanche qui semble avoir déjà tout pardonné et les genoux de Charlie, à côté d’elle, parce que même la regarder est trop difficile. « I– I– » La main non occupée par Korra passe sur son front et en dégage des mèches récalcitrantes ; elle est complètement décoiffée, rendue hagarde et salie par une nuit blanche passée avec quelqu’un qui n’était pas la femme de sa vie, encore plus amoindrie qu’elle ne l’a été après que Victoria l’ait chassée de chez elle. « She found out », ça sort comme une ponctuation impossible et confuse, le genre qui veut tout aussi bien dire it’s over mais qui n’ose pas encore se rendre de peur de se fracasser complètement. Korra lui baille dans la tronche et c’est tout ce qu’il lui faut pour se retenir, encore rien qu’un peu.

@Charlotte Cosgrave