Table n°6 : Ekko & Murphy

Je me sens mieux à présent, à défaut d’être léger, je suis suffisamment soulagé pour qu’un fin sourire puisse naturellement se dessiner sur lèvres. Libéré, je le suis d’un énorme poids sur ma poitrine, celui de ma conscience. Je profite de ce sentiment appréciable, extrêmement salvateur après une journée passée à broyer du noir et à ressasser une conversation qui n’aurait jamais dû se dérouler de la sorte quand on sait de quoi elle est partie. Tu repenses à sa partition, celle qu’il a pris soin de t’adresser dans ta langue, le français. Les paroles d’une chanson d’amour qui te font frissonner et toi, ce petit carton multiplié qui en disait long sur tes désirs. Comment avez-vous pu passer d’un extrême à l’autre aussi rapidement ? La frustration est une émotion dangereuse que je cerne un peu mieux encore à présent. Deux séries de trois minutes et la soirée se terminera, ouvrira la porte à des explications nécessaires, certes, mais qui devraient surtout nous permettre d’avancer dans une direction ou dans l’autre. Ton cœur bat à tout rompre, tu te laisses tenter par un ultime regard que tu te fais une joie de lui dédier, à ce sourire qui s’éveille à nouveau naturellement alors que tu t’assieds à une autre table que celle à laquelle @Bran Sussex s’installe, lui aussi. La soirée sera bientôt terminée mais pour l’heure, place à un garçon que j’accueille d’un sourire courtois. « Bonsoir, Ekko, enchanté ! » Je lui tends la main, paré pour une poigne amicale. « Pour ne pas perdre de temps, j’ai vingt-sept ans, je suis français comme mon accent le laisse très largement deviner et je suis professeur… De français également ! Et toi ? »  

TENUE

un premier tour de bouclé. et murphy, il se demande toujours ce qu'il fait ici. au changement de table, il ne manque pas de fusiller @matthew callaghan du regard. il se jure qu'il lui fera sa fête par la suite. bien trop proche de la précieuse. ça ne lui plaît pas, à murphy. vraiment pas. il faut bien avouer qu'il a tout de même sa part de responsabilité aussi. lui qu'a jamais montré de photo de la blonde et qu'a juste fait qu'en parler. il se dit pourtant que ça aurait dû être suffisant. mais visiblement, non. ce n'était pas le cas. on lui indique une nouvelle table à laquelle il se rend en trottinant. il se prendrait presque au jeu tiens donc. et dans sa décadence, il en oublierait que cette soirée est supposée être sérieuse. y a jamais rien d'sérieux, avec murphy. lui qui prend tout à la légère. tout le temps. la main dont il se saisit sans plus attendre. et les paroles qui défilent, en face de lui. et ben enchanté mon vieux. l'entrée en matière bancale à souhait. question d'habitude. et ben moi c'est murphy, trente-quatre ans et branleur de service. immense sourire qui illumine son visage. vraiment aucun sérieux ne se dégage de lui. pitre de service qu'a vraiment pas l'intention de faire des efforts pour paraître différent de sa véritable personnalité. j'suis un peu trop fan de ton accent par contre mais ça j'crois que ça l'fait à tout l'monde. fallait qu'il le dise pourtant. paraît qu'y a une histoire sur le fait que les américains adorent par dessus tout l'accent français. ou alors c'est une autre de ces légendes urbaines. oh bah tiens, on est un peu voisin en fait. ma mère est portugaise. hausse d'épaules. la désinvolture à son paroxysme. alors, qu'est-ce qui t'amènes ? s'il avait zappé les formalités d'usage sur le précédent round, il s'dit qu'il devrait p'tre essayer d'coller un peu à ce qu'on attend de lui cette fois-ci. quoi que c'est pas dit qu'il tienne tout du long.

Je n’ai qu’une hâte à cet instant précis, que la soirée se termine et que je puisse rentrer à la maison pour le retrouver. Lui, qu’il m’est seulement autorisé de regarder de loin. Lui, qui m’adresse un clin d’œil qui me réchauffe le cœur à une vitesse tellement folle que j’arrive à ma table complètement euphorique. Je m’installe, très vite arraché à ma solitude par un autre garçon que je trouverais très aisément mignon et à mon goût si tout en moi ne réagissait pas qu’à un seul mec non loin d’ici. Mon vieux, il me serre la pince et démarre fort, d’une perche qu’il m’est impossible de ne pas saisir de cet air faussement indigné que je prends pour lui répondre du tac au tac. « Mon vieux… Mon vieux, qu’il dit ! Tu m’as l’air bien plus âgé que moi, papy ! » Je ponctue mes propos d’un clin d’œil, très rapidement envahi par une légère inquiétude, de celles qui accompagnent un individu quand il ose dépasser trop rapidement les frontières de l’acceptable en compagnie d’une personne qu’il ne connait pas. Le mec pourrait bien très mal le prendre et s’emporter contre moi, me fusiller du regard, m’envoyer une rose jaune dans la gueule et se casser en multipliant les insultes. Il n’en fait rien pour le moment, plutôt bon signe, non ? J’irais même jusqu’à affirmer qu’il est plutôt cool et détendu, suffisamment pour qu’il soit possible de passer un bon moment, en toute légèreté. « Branleur de service ? Tu ne devrais pas user d’un tel qualificatif ici, on pourrait penser que tu masturbes à tout va… J’suis sûr qu’il y a un public pour ça ! » Toujours plus, comme d’habitude. Une fois lancé, rien ne m’arrête, moi non plus. Il complimente mon accent et j’éclate de rire. Tu es fermement décidé à l’adorer, ce mec. Une bouffée d’air frais comme tu les adore. « Les américains raffolent de l’accent français et du French Kiss. C’est mon seul avantage parce qu’on est vraiment à chier pour apprendre les langues étrangères. J’ai mis tellement d’années à apprendre l’anglais à cause de cela ! » Ce ne sont pas les cours qui m’ont permis de faire mes armes en la matière, bien au contraire. J’ai appris tout seul, de mon côté, en regardant des séries et en lisant des romans. À chacun sa méthode miracle. Le portugais me fait froncer les sourcils, mort de rire et désabusé à la fois. « Les portugais craignent au football, ils ont volé l'Euro à la France... Ils craignent aussi à l’Eurovision, peut-être même encore plus ! » Je note, comme s’il s’agissait d’une référence suprême. Tout cela parce qu’une chaine de télévision a voulu te recruter pour représenter la France en 2020 après ta sortie de The Voice. N’importe quoi. « J’voulais rendre jaloux le beau mec, là-bas… Puis j’me suis rendu compte que c’était hyper puéril et que je n’avais pas besoin de cela… J’devais juste prendre mon courage à deux mains pour aller lui parler. Il était trop tard pour faire machine arrière, cela dit… Et toi ? »

TENUE

il est content murphy. l'gamin en face de lui qui rendre dans son jeu, qui s'adapte à sa connerie. ça lui fait du bien. il n'aura pas perdu sa soirée, c'est clair. entre la jolie olivia qu'a suivi ses règles et ekko qui saute à pieds joints dans sa connerie, il ne s'en sort vraiment pas mal, le brun. un peu de respect pour ton aîné je te prie. qu'il rétorque en prenant volontairement une voix tremblante. faut vraiment qu'il arrête de s'donner en spectacle. s'en suit une courte présentation. très succincte, certes, mais en même temps, y a pas grand chose à dire sur lui. pas besoin de raconter qu'il est en r'tard constamment, qu'il n'est pas capable de garder un emploi, qu'il n'est pas non plus capable de gérer ses putains d'sentiments pour la blonde que son meilleur ami a géré comme jamais au tour précédent. et murphy s'penche sur la table, un peu, pour qu'il n'y ait que son partenaire qui l'entende. faudrait pas rameuter n'importe qui non plus, c'est pas la foire. et si ça s'trouve, c'est vrai. qu'il s'branle tout l'temps. et il hausse les épaules, la tronche du type innocent alors qui se laisse choir à nouveau dans l'fond d'sa chaise. l'accent français complimenté et le rire que l'gamin lâche. c'est priceless et ça lui plait bien d'ailleurs. han ouais, le french kiss c'est genre la meilleure idée de tous les temps. qu'il s'extasie comme un gamin qui découvre la vie. c'est con par contre parce que l'anglais, ça m'a l'air bien plus simple que l'français. genre y a pas comme des tonnes de conjugaisons, la grammaire est dégueulasse ou j'sais pas quoi ? les sourcils qui s'froncent alors qu'il fouille dans ses souvenirs lointains. ouais bon, j'suis une vraie merde aussi en apprentissage des langues étrangères donc bon, je te comprends paaaaaarfaitement. il ne se cachera pas murphy. jamais. à part le portugais qu'il parle à la perfection, en plus de l'anglais, y a jamais rien qu'il a été capable d'apprendre. pas pour rien non plus qu'il a quitté l'école dès que possible. oui alors, je suis d'accord avec toi, sur tout, en fait. parce que pour vrai, les portugais, à part construire des baraques, on est pas doués pour grand chose. et le cliché international vient bien évidement de sortir de sa bouche. au top le murphy. comme d'habitude. lui qui rit de tout. tout l'temps. ça pourrait vexer beaucoup d'gens. et concrètement, c'est pas ça qui va l'arrêter. parce que l'regard et le jugement des autres, il n'en n'a strictement rien à carrer. et c'est pas d'main la veille que ça va changer. sage décision. agir en adulte responsable. tu maitrises, j'suis fier de toi. bien qu'ils ne se connaissent absolument pas et que cela ne doit avoir aucun impact sur lui. et ben moi, figure-toi que je ne sais aaaaaaabsolument pas c'que j'fous là, en fait. et l'rire qu'il ne peut contenir. parce que c'est la vérité la plus vraie qu'il pouvait sortir ce soir. j'me souviens même pas d'où c'est parti ni même de comment j'me suis retrouvé dans c'merdier. mais tous mes potes sont là alors j'suppose que j'me suis embarquer dans la foulée. non, vraiment, impossible de se souvenir le pourquoi du comment de sa présence.

Mon premier speed-dating m’a laissé une bonne impression. J’irais même jusqu’à affirmer que c’est en partie grâce à @Katalina Hawkes que j’ai trouvé comment l’aborder (@Bran Sussex). Tu l’as fait par SMS, certes, mais tu ne pouvais pas rester plus longtemps sur une mention comme celle-ci. Un simple « vu » qui n’a eu de cesse de te tordre les boyaux. Tu t’es trouvé horrible, de lui refuser une réponse comme tu l’as fait mais… Qu’aurais-tu pu dire de plus ? Rien n’aurait été constructif à cet instant, il était préférable de prendre le temps de redescendre en pression, de méditer et de trouver l’angle le plus adapté pour exprimer ce que ton cœur ressent véritablement. Apaisé, détendu, le sourire n’est plus uniquement de façade face au boute-en-train qu’est Murphy. Il ne manque pas d’énergie, encore moins d’humour et j’apprécie cette facette de sa personnalité. Il m’amuse, parvient à me changer les idées sans même s’en rendre compte et me donne envie de laisser s’exprimer à nouveau mon naturel. Tu es libéré de ce poids sur ta cage thoracique, même si ton regard ne le quitte jamais très longtemps. Sa voix d’aïeul me fait mourir de rire. « Quand tu commenceras à nous respecter nous, les jeunes, papy ! » Je lui tire la langue et me laisse retomber contre le dossier de ma chaise, à l’aise. Il se penche, sur le ton de la confidence, et rentre dans mon jeu sans nier mes odieuses insinuations sur la masturbation, m’arrachant au passage un rictus conquis. « Et c’est à cet instant que je te demande de soulever ton t-shirt au niveau des manches et de contracter tes biceps pour les comparer et attester d’une éventuelle irrégularité qui révélerait la sollicitation plus… Appuyée d’un bras par rapport à l’autre. » J’hausse les sourcils plusieurs fois, d’un air quelque peu… Pervers. Loin de croire à ce cliché qui, soyons honnêtes, n’a rien de réaliste. Se masturber, même douze fois par jour, ne muscle en rien les biceps. Le poignet travaille davantage, en revanche, c’est certain. Douze fois… Tu grimaces à cette idée, la douleur mec… La douleur ! « N’EST-CE PAS ! » Le French Kiss une base, le cultural reset par excellence, n’est-ce pas ? Sauf qu’en sollicitant mes souvenirs au-delà des stéréotypes, le baiser le plus marquant, je lui dois à lui (@Bran Sussex), là-bas. « L’anglais est clairement plus simple que le français. Notre langue est un vrai supplice à apprendre et pourtant les étrangers s’en sortent nettement mieux dans leur apprentissage que nous. Les français sont vraiment des glandeurs ! T’aurais bien ta place, là-bas, du coup ! » J’ose le taquiner, lui balancer un petit tacle purement basé sur ce qu’il a énoncé précédemment à son sujet. Ce mec-là, je le sens, il pourrait devenir un excellent pote et c’est aussi pour cela que j’aime les manifestations de ce genre où tu es forcé à côtoyer des gens que tu ne connais pas. Les idées reçues pleuvent sur les portugais qui n’ont pas sommeil ce soir et j’adore cela, typique des soirées avec les potes lorsque j’habitais encore à Lyon. Typique d’une vie qui, souvent, me manque affreusement. Sa présence ici demeure un mystère que lui-même ne parvient pas à élucider. « Mouais… T’es à la recherche du grand amour et t’oses pas le dire, c’est ça ?! »

@Murphy Ellis

TENUE