une ivresse efface mille tristesses - 06.01.22 - sasha & paloma

[ une ivresse efface mille tristesses. ]

06 janvier 2022

22h30 un peu passé, la nuit est déjà bien tombée quand Paloma quitte le nouveau local qu'elle vient d'acheter. Installée en rez-de-chaussée en plein coeur du quartier français, la nouvelle boutique Gartzea ouvrira ses portes au début du mois de février. La première ici à la Nouvelle-Orléans. À l'étage, un appartement ancien récemment rénové qui pourra lui servir de bureau et d'atelier. Paloma passait une partie de ses journées ici, histoire de finaliser les derniers préparatifs de cet évènement.

Ce soir, la rue est peu animée. Le petit groupe de musique qui avait prit possession du trottoir d'en face en début d'après-midi avait déserté sur les coups de 21h après que la majeure partie des passants se soit installée sur les terrasses des restaurants ou soit rentrés à la maison. L'air était frais mais pas désagréable.

Paloma traversait tranquillement la rue pour s'enfoncer dans une autre, plus exiguë, plus silencieuse encore. Elle ne changea pas de trottoir en apercevant une silhouette se détacher de la pénombre et avancer vers elle. Rien ne laissait penser à un danger éventuel et Paloma n'était pas du genre à se laisser aller à la panique.

L'ombre s'arrêtait finalement à mi-chemin, tournée vers l'entrée d'un bâtiment. Un cliquetis, le bruit de la porte qui s'ouvre, la lumière du hall qui s'allume et qui déborde dans la rue. Paloma avait le temps de voir l'ombre prendre les traits d'un jeune homme, la trentaine, cheveux bruns au physique plutôt sportif. Sûrement quelqu'un qui habitait là. Alors qu'il s'apprêtait à entrer dans le bâtiment, vient à Paloma l'idée de sortir de son sac les quelques flyers fraichement reçus de l'imprimeur annonçant l'ouverture prochaine de sa boutique. Elle se disait qu'un contact direct avec sa possible clientèle serait plus avantageux et, aussi, elle pourrait laisser quelques invitations dans les boites aux lettres des autres habitants de ce bâtiment, si tenté qu'il y en ait.

Elle pressait le pas, l'homme tournait la tête vers elle, s'arrêtant un instant pour lui sourire. C'est qu'il était pourvu d'un certain charme, le garçon. Paloma n'eut aucun mal à lui rendre son sourire alors qu'elle avançait un peu plus vite. Peut-être l'avait-il reconnue et qu'il voudrait lui demander un selfie ou un autographe, comme ce groupe de jeunes adolescentes qui étaient venues toquer à la porte de sa boutique aux alentours de 16h et qui avaient pu visiter en avant-première son lieu de travail. Ou bien était-ce juste un charmant monsieur qui voudrait l'avertir du danger que représentait une balade dans ces rues la nuit pour une femme sans compagnie et qui plus est n'était pas d'ici. Quoi qu'il en soit, il avait comprit qu'elle venait vers lui et patientait gentiment qu'elle arrive à son niveau, ses quelques papiers imprimés entre les mains.

Bonsoir. Je vous prie de bien vouloir m'excuser, pourrais-je déposer quelques invitations dans les boîtes au lettre de votre immeuble ? Elle lui offrait son plus beau sourire, celui qui avait pour habitude de charmer quiconque face à elle. Elle lui tendait un papier. J'organise une sorte de pot pour l'ouverture de ma boutique au coin de la rue, je me suis dit que ce serait sympathique de rencontrer les gens du quartier. Et par la même occasion se montrer gentille et attirer ses premiers clients. Les affaires sont les affaires. Mais plus elle regardait le beau brun face à elle et plus elle trouvait son regard et son sourire familier. C'était presque devenu une habitude depuis son installation. Elle avait croisé Adriel Tucker à l'épicerie, donc tout était possible ! Mais lui poser la question reviendrait à donner l'impression qu'elle utilisait une technique de drague qui ne marchait sans doute plus depuis des siècles.

/ awards session

[ une ivresse efface mille tristesses. ]

@Sasha Caldwell & @Paloma Gartzea

06 janvier 2022

De longues années passées depuis les bancs de l’université, à se perdre dans l’excitation de projets tantôt réalistes tantôt fantasques. Malgré les rides et les responsabilités gagnées au fil des ans, Sasha n’avait jamais vraiment perdu cette fibre, cette passion pour un domaine qui avait toujours fait sens pour lui; qui avait toujours su attiser sa création et ses neurones. L’heure, il ne l’a voyait jamais réellement passer. C’est avec un message à Siobhan et une commande de pizza qu’il avait cimenté l’envie de rester travailler sur un sujet avec ses collaborateurs. Sasha savait que sa femme ne lui en tiendrait pas rigueur; surtout qu’elle était elle-même occupée en cette soirée. Et après tout, elle était tout autant - si ce n’est plus - impliquée dans sa propre carrière, et c’est un bon équilibre qu’ils avaient trouvé entre leurs ambitions respectives et leur vie de famille. Sasha avait eu le temps de s’habituer au fait d’être la part d’un tout : une femme, des beaux-enfants, et des attentes supplémentaires qu’il peinait parfois à accomplir. Mais il faisait de son mieux, et il était à peu près sûr que ses efforts étaient en train de payer. Sa belle-fille ne semblait plus haïr chaque fibre de son corps, un sacré progrès!

C’est satisfait mais impatient de rentrer que Sasha quitte les locaux de sa boîte. Par choix de proximité et de praticité, il se décida à passer la nuit dans son appartement plutôt que de rejoindre le domicile familial. La Nouvelle-Orléans ne dormait vraiment jamais, et qualifier les rues de désertes à cette heure-ci serait mentir, mais la population se faisait de plus en plus rares et fur et à mesure des rues empruntées. Il était sur le point de passer le pas de la porte lorsqu’une silhouette dans son champ de vision le fit se stopper net. Une femme, flyers en mains, s’approchait de lui et, malgré l’heure, Sasha avait assez de décence pour ne pas lui tourner les dos. Elle était clairement décidée à lui donner ce qu’elle tenait en main et il pouvait bien lui accorder quelques minutes pour ça. Il lui adressa un sourire, souhaitant la rassurer sur le fait qu’elle n’avait rien à craindre à l’approcher. C’est avec politesse qu’elle verbalisa sa demande, et Sasha n’avait franchement rien contre. Au pire, la chose finira avec indifférence dans le bac de recyclage. Au mieux, il informera ses voisins sur un nouveau commerce local. « Oh bien sûr, pas de soucis, c’est une bonne idée » dit-il en tendant une main pour qu’elle lui donne les flyers. « Bienvenue dans le quartier alors, j’espère que vous allez vous y plaire » dit-il tandis qu’il parcourait des yeux le papier et ses informations. Lorsqu’il leva finalement le visage sur son interlocutrice, bien éclairé par la lumière du porche, une drôle de familiarité s’empara de lui. Elle lui disait quelque chose de cette manière vague que l’on peut tout aussi bien associer au souvenir d’un ami d’enfance ou d’un visage inconnu vu à la télévision. Il était bien incapable d’associer ses traits à un prénom et encore moins à une situation en cet instant. « A moins que vous ne connaissiez déjà le coin? » dit-il, une simple curiosité, mais peut être était-ce la réponse à son interrogation. Sans doute l’avait-il déjà croisé ici ou là en ville.

Spoiler:

/ awards session