I'll never let you go. (Haniel)

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feat. @Haniel Marshall

Peut-être un peu froid, un peu distant. Il doit bien l'admettre, savoir qu'elle est de retour l'inquiète. Il n'est pas bête, le restaurateur. Il a connu la guerre, il a vu des horreurs dont peu seraient capables d'affronter au quotidien et pourtant, il n'a jamais plus peur de ses cauchemars que d'elle.
Parce qu'elle est tout ce qu'il a toujours redouté.
Sur le champs de bataille de sa propre existence, elle est plus qu'un simple ennemi. Elle est toute l'artillerie qui l'accompagne et il sait, Ardal, qu'il ne peut pas lutter contre des sentiments refoulés, même passés. Ils ont vécu quelque chose de fort, là-bas. Et même s'il ne doute pas un instant de l'homme qui partage sa vie, il ne peut pas s'empêcher de se souvenir, à chaque instant, avec quelle dévotion il était amoureux d'elle autrefois.
Froid, distant, un peu rêche même. Il a mis d'la distance sans le vouloir, peut-être même qu'il sera la raison pour laquelle il ira la retrouver. Peut-être qu'à s'comporter comme un crétin, il finira par lui donner toutes les raisons du monde de s'détourner.
Alors ouais, ce soir, il fait un effort.
Faut pas s'mentir, le feu brûle toujours les premiers jours mais les étincelles meurent si on ne les entretien pas. Alors en quittant le restaurant, il a emporté avec lui quelques restes qu'il compte lui servir plus tard. Sur le chemin, il a acheté ses fleurs préférées en se gaussant d'être toujours aussi amoureux d'lui depuis toutes ces années. C'est vrai, jamais son fusil n'a changé d'épaule, qu'importe les obstacles. Pourquoi ça s'rait différent aujourd'hui ? il s'interroge alors qu'il pousse la porte de leur duplex d'un coup d'épaule. Il m'aime c'est une certitude, il le sait. Les ouragans, les orages et les tempêtes ne suffiraient pas à les faire faiblir. Voilà une décennie qu'ils se connaissent, même mieux que ça. Alors dans le silence le plus absolu, il dresse une table parfaite. Il est tard, ou tôt, tout dépend du point de vue. Depuis l'ouverture, ils n'ont pas eu beaucoup d'instants à eux. Il allume deux chandelles, c'est nian-nian mais c'est tout à son image. Je l'aime putain, il se rappelle en souriant, comme un crétin, alors qu'il glisse un vinyle de Barry White dans le lecteur et qu'il dispose les fleurs sur le centre de la table. Ouais, cliché, romantique et stupide mais après ces derniers jours à s'être montré aussi détaché et distant, Ardal, il sait qu'il doit se rattraper.

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La réunion des vétérans venait de toucher à sa fin, Haniel était gentiment resté prostré devant le bâtiment pour fumer une cigarette et se vider la tête. Il aimait ce qu’il faisait, il aimait aider ces personnes qui se retrouvaient abandonnées du jour au lendemain sans savoir que faire du reste de leur existence. Mais c’était une activité lourde, épuisante pour le moral parce qu’il fallait encaisser, entendre les horreurs et les erreurs des autres, être cette éponge qui leur permette d’oublier et d’aller de l’avant le cœur plus léger.

Il écrasa son mégot et le laissa choir dans le cendrier avant de prendre la route de son appartement. Il avait hâte de rentrer pour se poser et laisser son esprit se vider de cette lourde journée. Il espérait simplement que son fiancé soit de bonne humeur et enclin à glander joyeusement devant une connerie à la télévision. C’était quelque peu tendu entre eux depuis l’arrivée inattendue de Lily en ville, Haniel était blessé de se prendre indirectement les répercussions de cette présence alors qu’il ne pouvait rien y faire.

Il fourra sa main dans sa poche de jogging pour attraper son trousseau de clés et salua une de leurs voisines qui venait de sortir de l’immeuble. Il avait toujours été poli avec le voisinage, une habitude qu’il ne comptait pas perdre. Travaillant en restauration, il en rencontrait des clients malpolis et irrespectueux, mais il devait essuyer leurs commentaires d’un revers de main. Ces personnes-là ne comprendraient jamais la dureté du métier et ne cesseraient de clamer que le client est roi. Connards.

Il gravit quatre à quatre les marches qui menaient à leur petit nid douillet et glissa les clés dans la serrure. « Coucou Ar… » Il se stoppa net dans sa phrase en voyant la table dressée et les bougies allumées. « J’ai oublié une date ? Un évènement ? » Il ferma rapidement la porte et rangea le trousseau dans un raclement de gorge gêné. « Je suis en jogging ? » Un rire finit par s’échapper d’entre ses lèvres.

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Quand il entend tourner les clés dans la serrure, il ne peut pas s'empêcher de sentir son ventre se tordre légèrement. Il sait les enjeux de cette soirée, il a conscience d'avoir été un vrai petit con ces derniers jours et qu'il s'est montré bien moins agréable que d'ordinaire. Il a fait d'son mieux pour chasser toutes les images qui le hantent depuis qu'il sait qu'elle est de retour. Il craint pour son couple, Ardal, c'est normal. Après toutes ces années à en avoir rêvé, il ne supporterait pas d'avoir à supporter de le perdre. Alors quand il entend la voix d'Haniel dans le couloir, il ne sourit pas vraiment. Coucou Ar… interrompu dans sa propre phrase lorsqu'il aperçoit la table, les bougies et qu'il entend la musique. J’ai oublié une date ? Un évènement ? il ferme la porte, tousse légèrement et se retourne vers Ardal, gêné. Je suis en jogging ? il rigole, le restaurateur, en s'approchant de son fiancé. C'est visiblement la première chose sensée que tu dis depuis que tu es rentré. qu'il rétorque en attrapant ses hanches pour l'attirer contre lui. Il dépose un rapide baiser sur ses lèvres avant de se détacher, reculer d'un pas. T'as rien oublié, rassure toi. il déclare en passant une main dans ses propres cheveux. Longs, désormais, bien plus que lorsqu'ils s'étaient rencontrés. La dégaine d'Ardal a changé, avec le temps. Elle vire presque au hippie certains jours. C'est plus l'même homme, c'est plus la même époque non plus. J'avais juste envie de m'faire pardonner ma mauvaise humeur de ces derniers jours. qu'il ajoute en ôtant le manteau d'Haniel pour le déposer. Il glisse une main dans son dos, l'entraîne avec lui dans le séjour. La réunion s'est bien passée ? il admirait énormément Haniel d'avoir eu le courage de s'engager dans cette voie. Ardal n'avait pas eu le courage de le suivre, la guerre, il ne souhaitait plus en parler depuis qu'il avait failli y perdre l'homme qu'il aimait le plus au monde. Les traumas, les stigmates, il les porte sur lui depuis toutes ces années. La moto, c'est tout ce qu'il a trouvé pour se sentir vivre et se vider la tête. C'est pas très malin, mais c'est ce qu'il avait trouvé de mieux.

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La remarque sur le jogging fit mouche auprès de son fiancé qui ne put contenir son hilarité, venant le gratifier d’un baiser qu’Haniel trouva bien trop court. Il admira un instant l’homme qui partageait sa vie, le laissant prendre son manteau et se fit guider dans le séjour sans broncher. C’était agréable de briser la routine comme ça, de prendre le train en route et d’en changer la direction le temps d’une soirée. Cependant, il ne put s’empêcher de froncer les sourcils lorsqu’Ardal lui évoqua la raison de ce dîner aux chandelles. Ainsi donc, il s’agissait de se faire pardonner de sa mauvaise humeur, mais il n’avait en rien besoin de s’excuser sur la chose.

« Tu n’as pas besoin de me faire un dîner aux chandelles pour te faire pardonner de ton caractère de cochon, faut dire que la situation est inattendue mais c’est pas pour autant qu’elle va changer nos vies. » conclut le cuisinier, sachant très bien la raison du caractère soudainement bougon de son fiancé. Lily avait débarqué dans leur vie sans prévenir, sans lever le pied, de quoi affoler les sentiments et les peurs de chacun. Il était hors de question, pour Haniel, de laisser cette femme détruire le monde qu’ils avaient construit à la sueur de leur front, à la chaleur de leur amour.

Haniel glissa une cigarette entre ses lèvres et indiqua d’un mouvement du menton le petit balcon de l’appartement. Il avait besoin de sa dose de nicotine avant de savourer cet instant à deux. « C’était assez difficile aujourd’hui, j’ai dû calmer un début de dispute entre deux types qui partageaient pas la même vision des choses. » Il savait qu’Ardal n’avait pas eu le courage de replonger dans les séquelles de l’armée et ne souhaitait pas s’étendre sur le sujet, de peur d’ouvrir d’anciennes cicatrices.

Il cracha un nuage de fumée, sa main se glissant dans le creux du dos de son fiancé comme pour le rassurer. Parce qu’Ardal avait cet effet sur lui, cet effet dont il ne pouvait se passer. Cet homme parvenait à faire fuir les mauvaises pensées, les doutes, les inquiétudes sans à avoir à lever le petit doigt. Ce meilleur ami dont il ne pouvait plus se passer, qui avait toujours été là à ses côtés sans ployer le genou. « Et toi ? T’as fait quoi de beau après le taff ? »

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C'était comme ça, c'est vrai. Ardal mesurait chaque jour la chance qu'il avait de pouvoir enfin vivre cette histoire dont il avait rêvait si souvent. Perdre l'occasion d'aimer cet homme, ce serait comme lui couper le souffle. Pour lui, il avait tout sacrifié et tout abandonné. Alors oui, il faisait de son mieux pour que le feu ne s'éteigne pas, que l'étincelle demeure et tant pis si ça voulait dire le surprendre en jogging pour un dîner aux chandelles. Tu n’as pas besoin de me faire un dîner aux chandelles pour te faire pardonner de ton caractère de cochon, faut dire que la situation est inattendue mais c’est pas pour autant qu’elle va changer nos vies. et il veut y croire, Ardal, si fort. Pourtant, il ne peut s'empêcher d'imaginer Lily comme un grain de sable. Un grain de sable qui s'infiltre dans un rouage pourtant bien huilé et qui provoquera, sur le long terme, des dégâts considérables. C'est de son bonheur qu'il est question et, jalousement, Ardal refuse d'y renoncer. C'est plus fort que moi, je suis désolé. qu'il dit, un peu bougon. Le fait est qu'il est franc, il l'a toujours été. Entre eux, pas de mensonges (enfin, pour Ardal tout du moins) depuis toujours. Je m'y habituerai mais pour l'instant, j'avoue que j'ai du mal à croire que ça ne changera rien à nos vies. et il refuse d'épiloguer. Il change de sujet, s'intéresse à sa journée pour dévier la conversation. Haniel l'invite à le suivre sur le balcon, le restaurateur s'exécute poliment, en souriant du mieux qu'il peut. Chasser une idée sombre pour en accueillir une autre. Parler de la guerre, c'est difficile pour Ardal. D'ailleurs, il avait refusé de suivre Haniel aux réunions. C’était assez difficile aujourd’hui, j’ai dû calmer un début de dispute entre deux types qui partageaient pas la même vision des choses. il attrape une cigarette à son tour, l'allume timidement alors que la main d'Haniel se pose dans son dos. Un contact qui le fait presque rougir. Pas simple, j'imagine bien. Lourd aussi. Tu dois être fatigué. qu'il dit. Peu de mots, peu de choses. Il ne voudrait pas approfondir le sujet et pourtant, il ne veut pas lui donner l'impression de s'en foutre. Ce que fait Haniel est important pour lui, la réciproque devrait sans doute être vrai. Mais parler de tout ça, c'est comme avancer sur un terrain miné... et c'est une expérience qu'il a déjà vécue. Et toi ? T’as fait quoi de beau après le taff ? à contrario de son fiancé, Ardal s'était aussi engagé auprès d'associations mais pas pour vétérans, non. Lui, il avait choisi la cause animale. Parce qu'au fond, il estimait plus saint de s'occuper de labradors que d'anciens militaires. Plus rassurant, plus réconfortant et plus agréable aussi. Il hausse les épaules en souriant un peu plus. Le bon vieux Jack s'est réveillé de son opération un peu groggy mais je crois que ses testicules ne lui manqueront pas vraiment. il rigole un peu, s'approche d'Haniel et, sans subtilité aucune, pose sa main libre sur son entre-jambe et palpe. Ce qui ne serait pas mon cas te concernant. il dit en plaisantant, d'humeur taquine.

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Les deux hommes avaient souffert de la guerre et guérissaient à leur manière. L’un tentait de sauver les autres pour se sauver lui-même à travers des réunions, des aides qui lui bouffaient son énergie. L’autre souhaitait tout laisser derrière lui et ne plus en entendre parler. Haniel respectait son choix et n’éternisa pas sur le sujet.

Lui-même avait bien du mal à accepter son choix de rédemption suite aux nombreuses disputes de la journée. Il préféra cracher un nouveau nuage de fumée plutôt que d’en faire un commentaire. Il s’appuya un peu plus sur la barrière du balcon et posa son regard sur son aimé dans un sourire, ce n’était pas le moment de penser à ça, Ardal lui avait fait une surprise et il comptait bien en profiter.

Il manqua de sursauter quand il sentit sa main à cet endroit précis et le poussa légèrement pour recouvrer de son trouble. « Ardal ! » rit-il en écrasant son mégot dans le cendrier. « T’en rates jamais une toi ». Il se pencha vers son fiancé pour langoureusement l’embrasser, enivré de ce contact, de cette chaleur si familière qui le fait se sentir chez lui. Comment avait-il fait pour passer tant d’années à ses côtés sans le désirer comme il le faisait aujourd’hui ? Toutes ces nuits à dormir contre lui pour ignorer la froideur des déserts.

Il rompit le baiser et vint saluer leur chien qui se demandait ce qu’ils étaient en train de fabriquer dehors. « Tu nous as préparé quoi de bon, chéri ? » demanda-t-il en prenant le chien dans ses brase et en se tournant vers son compagnon. « A moins que ça soit toi le repas ? »

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Personne mieux qu'eux peuvent savoir ce que c'est que de parler de guerre quand on en revient. Haniel avait fait le choix d'aider les autres à se livrer, Ardal, de son côté, avait préféré en faire un autre. Le déni était mauvais, sur le long terme, et expliquait sans doute ses récents accès de colère. Au fond, il ne s'en était jamais remis. C'était pas tant la guerre qui l'avait marqué que la première fois où il avait failli perdre Haniel. Au fond, c'est peut-être pour ça qu'il devient parano lorsqu'il s'agit de son couple, de son homme. Tant d'années à le vouloir et l'obtenir enfin. Il devrait s'en contenter, s'en satisfaire, mais chaque mot mal formulé devient un enfer pour l'ex-soldat. Il se fait des films de tout et de rien, parce qu'il a déjà eu l'impression d'le perdre une fois et qu'il refuse d'avoir à le vivre à nouveau.
Pourtant, leur complicité fait plaisir à voir, elle, elle ne change pas. Toujours la même, toujours pareille. Les années n'ont pas éteint ce qu'ils sont, ce qu'ils étaient. Amis avant tout. Alors quand il attrape les testicules de son conjoint, ce dernier esquisse un large sourire avant de rire. Ardal ! qu'il dit en le repoussant légèrement. T’en rates jamais une toi. et ce dernier sourit, très content de son effet.
Le désir, toujours là, omniprésent.
Personne ne peut comprendre.
A l'aimer toutes ces années en espérant un jour avoir le droit de le toucher, c'en est presque ridicule. Dédier son existence entière à un seul homme pour finalement enfin pouvoir l'aimer sans rougir. Il termine sa cigarette en haussant les épaules. Lorsque Haniel l'invite à entrer, il le suit à nouveau, caressant du bout des doigts l'animal qui se fraie un chemin entre leurs jambes. Tu nous as préparé quoi de bon, chéri ? il rigole, le restaurateur. Je te rappelle que de nous deux, c'est toi le chef. Tu sais parfaitement quelles sont mes compétences en la matière... qu'il dit sans rougir. Il est mauvais en cuisine, impatient et colérique. Il sait faire mais il n'aime pas. Il n'a jamais compris la passion de son homme pour ça et pourtant, il ne peut que respecter son talent. A moins que ça soit toi le repas ? le regard devient lubrique, Ardal rigole. Sans préavis, sans même prévenir, il fait valser le t-shirt par-dessus la tête et déboutonne son futal. T'as tout compris honey, prends moi sur la table que j'ai passé des heures à dresser, j'en crève d'envie. qu'il surjoue en s'approchant de lui, l'oeil alerte et la lèvre mordue.
Le désir... immuable. Une déflagration qui le prend chaque fois que son regard se pose sur Haniel. Toutes ces années à espérer, il se sait chanceux et pourtant, il n'arrive toujours pas à en profiter complètement. Comme si tout pouvait lui être arraché demain.

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