DEIA › i dug this grave i call my home. (DELAI JUSQU'AU 20/09)

(one) des yeux gris bleutés. ⋆ un fils ayant les yeux de sa mère. ⋆ prétend être un agent secret devant ton fils nommé Aedion. ⋆ une famille pensant que tu es sans emploi. ⋆ adoptée à l’âge de dix ans. ⋆ surentrainée aux arts martiaux et au tir. ⋆ atteinte de sociopathie, des suites du massacre de ta famille auquel tu as assistée. ⋆ tu ne ressens pas la douleur, analgésie congénitale venant probablement de ton géniteur. ⋆ excellente actrice, imitant parfaitement une personne ordinaire. ⋆ quelques-uns de tes assassinats ont été médiatisés, mais les preuves ne t'ont jamais incriminées jusque-là. ⋆
(two) tremblante, tu es restée là, assise dans le noir, bercée par l’espoir d’ouvrir les yeux sur un tout autre monde. loin des massacres, loin de la teinture rougeâtre s’écoulant lentement des trous de lumière laissés par les impacts. tu rêvasses, et doucement l’attente d’un renouveau s’échappe. le mirage s’envole pour laisser place au cauchemar. à quelques mètres de toi, derrière cette cloison, gisent les corps de tes frères aînés, et de ta mère. vies arrachées par les Jopok sévissant dans la région. ta génitrice les a trahis, forcée de divulguer des informations aux autorités pour leur permettre de les chasser. elle travaillait pour eux, et elle en a payé le prix.
(three) dans l’urgence, ton frère t’as cachée derrière cette cloison de la petite baraque improvisée. peut-être trop pauvres pour vivre décemment, mais prévoyants. le bruit des coups de feu résonne dans ta tête, les balles sifflent, te frôlent, les cris de ta mère, de tes frères, plusieurs boum, et le silence. un silence qui perdura deux jours avant que les autorités débarquent. un carnage qu’on te laisse pleinement observer lorsqu’on remarque les bords de la cloison partiellement fermée. on te prend la main, on te fait sortir, et tes yeux innocents constatent ta vie toute entière perdue dans un néant de souffrance. tu as tout perdu, tout. alors tes doigts se resserrent sur le veston de ta mère, qui t'a couverte durant ces fraîches nuits passées dans l’obscurité, et tu pleures.
(four) jeune homme accompagnant ta mère sur une photo, perdue au fond de la poche que chaque soir tu observes avec attention, triturant le pendentif que tes frères t’avait offert, installée dans un lit sans confort en compagnie d’autres enfants dans la même situation que toi. tu es à l’orphelinat d’Ilsan à Goyang, à peine âgée de dix ans. ton cœur se serre, et tandis qu’un garçon a volé pour toi un fruit au réfectoire, on te présente ta nouvelle famille.
blancs de passage, exaltés par les voyages et l’amour porté à leurs enfants. riches parents qui t’ont regardée danser et chanter pour tes camarades, l’espoir de leur rendre la vie plus douce par ta mélodieuse voix et ton entrain. tu caches ta peine derrière le chant, encourageant les autres enfants à sourire et danser avec toi lorsque tu offrais à la foule ton déhanché. c’est à eux, cette fois, qu’on arracha le rayon de soleil, emportant tes pas jusqu’à la Nouvelle-Orléans.
(five) on t'offre ce que tu appelles à tort un château. mais jamais cette richesse n’a su remplacer l’amour des Hwang pour toi, personne ne le pourrait. tu as aimé cette mère et ce père de substitution avant que la vie décide de te poignarder à nouveau. la plus jeune de la famille, la douce enfant souriante et enjouée, celle qu’on désirait protéger à n’importe quel prix. tu étais encore cette petite fille avant que les cloches ne sonnent tes dix-huit ans…
(six) l’anglais, tu l’as appris avec beaucoup de difficultés, hantée par un passé trop douloureux pour être oublié. ce que tu voulais toi, c’était survivre, et tu l’as obtenue… mais pas dans le sens qui te faisait envie. petit accent résiduel persistant dans ton parlé, pas moins gênant qu’embarrassant. tu es certainement la seule de la famille a avoir gardé ton passé dans la paroles. la douleur qui hante tes pas jusque dans ta carrière et tes activités extra-scolaires. ils ne savent rien… ils ne doivent rien savoir.
(seven) cet homme t’as prise sous son aile, percevant ton talent au travers de tes souffrances, de tes yeux si expressifs de colère et si vide de sens à l’époque. il t’a promis une carrière, il t’a promis le monde, en échange de tout ce que tu étais. pureté envolée, fusil armé, licence de tir obtenue haut la main, entraînements intensifs chaque soir après les cours. quand on pense que ta famille s’imaginait que tu ne faisais que traîner jusque tard avec tes amis, inexistants au passage. il te laisse faire tes choix, gérer les choses à ta manière. alors tu lui es redevable. forcée d’admettre que tu ne peux plus revenir en arrière, tu vends ton corps et ton talent contre une grosse somme d’argent dont tu n’as pourtant pas besoin. tu es sa favorite, celle qui lui rend chaque soir le sourire, celle qu’il admire, celle qu’il voit grandir. tu sais qu’il ne reculerait devant rien… absolument rien pour te protéger, peu importe le prix. tu es trop précieuse à ses yeux, et c’est ce qui lui a coûté la vie.
(eight) de beaux yeux gris posés sur la silhouette, le cœur qui à nouveau se met à saigner. il se serre, encore et encore, jusqu’à ce que des larmes envahissent tes belles prunelles. et ça coule, comme autrefois elles avaient coulées si ardemment. une mission dangereuse de trop, tout ça pour de l’argent. il gît là, son corps inerte, le sang qui s’écoule de ses plaies. il t’a tout appris, mais n’a pas su appliquer ses propres conseils. une petite fortune, qu’il disait. récompense qui n’aura pour résultat qu’un cœur brisé, et l’éveil d’une vengeance.
(nine) il était ton mentor, ton supérieur, ton ami mais surtout ton amant. de doux moments passés en sa compagnie, personne pour vous déranger, personne pour te faire la morale sur son âge avancé. il était celui que tu désirais, celui sur qui tu comptais, celui vers qui tu pouvais te tourner. et désormais il n’est plus. encore une fois, tout ça pour un paquet de fric qu’il aurait dépensé en conneries et dont il ne verra le bout du nez qu’à travers tes yeux. tu as repris sa suite depuis, à l’instant même où son cœur a cessé de battre. tu n’as rien dit. tu n’as rien dit à personne… et c’est sûrement ce qui te détruit.
(ten) cachée dans la pénombre, tu observes tes parents adoptifs s’occuper de l’être à qui tu as donné naissance quelques années auparavant. oncles et tantes aux petits soins avec ce petit garçon né du chaos. Aedion, ou la seule chose qu’il te reste d’un amour interdit perdu. désir de le protéger mêlé à la peur de lui faire subir quelconque menace proférées à cause de ton travail. une innocence si pure, un enfant pour te rappeler le sens de la vie et ses bons côtés. voilà, certainement, tout ce dont tu avais besoin.